L’Espace d’Art Contemporain Fernet Branca convie à un voyage artistique très particulier. Il s’agit d’entrer de plain-pied dans une collection extraordinaire où les œuvres tissent entre elles des liens subtils. Fruit de la passion, de la curiosité et d’un regard clairvoyant sur la peinture moderne, elle a été rassemblée par Jean Planque (1910-1998).
Une cohérence remarquable
Jean Planque acquiert dans les années 1940, pour lui ou pour des amis, quelques tableaux de maîtres des XIXe et XXe siècles. C’est le début d’une longue quête, que ni son éducation ni ses études ne laissaient présager. Cette rencontre avec l’art, due au hasard, le conduira à collectionner des chefs-d’œuvre de Picasso, Klee, Dubuffet ou de Staël. Le caractère spécifique de cette collection tient non seulement au fait qu’elle est composée d’œuvres d’artistes parmi les plus importants de ce siècle, mais surtout qu’elle révèle une rare cohérence entre chaque pièce conservée. Elle est le fruit d’un regard enthousiaste sur la peinture moderne ; d’un regard soucieux de comprendre un art qui s’est efforcé pendant plusieurs décennies de changer les habitudes de voir, de briser les normes établies par la tradition ; d’un regard clairvoyant, enfin, celui d’un amateur passionné qui confiait : « J’ai brûlé pour les tableaux. »
L’œil de Beyeler
Après s'être fait remarquer par des galeristes pour son instinct apte à déceler l'œuvre vraie dans le tout-venant des productions, Jean Planque devint le courtier de Beyeler, achetant pour lui à Paris, non pas des peintres encore inconnus, mais des artistes déjà cotés. Sa curiosité et son enthousiasme lui permirent de lier connaissance avec les plus grands artistes de son siècle, notamment Picasso, Giacometti et Dubuffet, qui le traitaient comme un égal. De Cézanne à Picasso, de Degas à Bonnard, de Van Gogh à Rouault, de Dubuffet à Kosta Alex, un unique souci aura conduit son œil : aucune concession à l’imagerie, à la joliesse ; au contraire, une poursuite exclusive de l’efficacité, de la profondeur, de la solitude du langage pictural. Derrière chaque tableau de la collection se cache une histoire, une anecdote. Quand on effectue le parcours complet, on est frappé par une sorte de tension entre la place de premier rang conférée à Dubuffet et, dans une certaine mesure, à Picasso et les choix, plus intimes, allant de Bonnard à Nicolas de Staël.
Fernand LÉGER Composition avec des lettres, Gouache sur papier vélin, 1919, 69x28,2 cm, © ADAGP, Paris Klee et Rouault mais aussi Auberjonois
L’exposition est organisée en collaboration avec la Fondation Jean et Suzanne Planque. Créée en 1997 par Jean Planque lui-même et ses amis, elle a pour but de sauvegarder les tableaux réunis par le collectionneur, de leur assurer un lieu de dépôt en accord avec l’esprit qui a présidé à leur réunion et d’en faire connaître la richesse par des expositions et des publications. Composée de quelque 130 peintures et œuvres sur papier de 50 artistes différents, cette collection est d'une rare cohérence. Elle reflète la double exigence de cet homme, qui fut également peintre. D'un côté, elle traduit son respect pour la construction rigoureuse du tableau (Cézanne et ses héritiers, les cubistes comme Gris, Braque, Léger, Delaunay), pour les poètes de la forme (comme Klee et Bissière). De l'autre, elle marque son attachement profond aux valeurs terriennes (Rouault, Tapiès, de Staël) ou son attrait irrésistible pour la liberté inventive d'un Dubuffet dont il fut longtemps le confident, mais aussi de ses amis vaudois Auberjonois, Soutter ou encore Aloïse.
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