Le festival Normandie impressionniste met à l’honneur, de juin à septembre 2010, l’impressionnisme sur tout le territoire haut et bas-normand. Cet événement pluridisciplinaire (de la peinture à la musique, du cinéma à la littérature), d’une ampleur inédite en France, est l’occasion de découvrir le patrimoine exceptionnel et toute la créativité de la Normandie, terre natale du mouvement. C’est dans ce cadre que le musée des Beaux-Arts de Rouen, qui abrite la première collection impressionniste de France hors de Paris, présente une centaine de chefs-d’œuvre des plus grands maîtres, dédiés à la ville « aux cent clochers ».
Des tableaux du monde entier
Evénement incontournable de ce festival, cette exposition reconnue d’intérêt national réunit un ensemble exceptionnel d’œuvres en provenance de collections publiques et privées du monde entier, dont plusieurs pièces maîtresses encore jamais exposées en France. Plus de cent trente tableaux de grands peintres de la fin du XIXe siècle, au premier rang desquels Monet, Gauguin et Pissarro, sont rassemblés et permettent d’explorer l’un des derniers grands thèmes de l’histoire de l’impressionnisme qui n’ait pas fait l’objet d’une exposition : le rôle joué par la capitale normande dans cette révolution picturale. Les œuvres sont présentées de façon principalement chronologique. À certains moments de l’exposition, des thèmes iconographiques sont toutefois isolés, de façon à montrer la persistance de motifs devenus classiques qui se retrouvent sur plusieurs décennies.
Monet et ses Cathédrales
Embrassant une vaste perspective, depuis les précurseurs de l’impressionnisme comme Turner jusqu’aux représentants de l’Ecole de Rouen tel Albert Lebourg, l’exposition remet sur le devant de la scène des artistes méconnus comme Charles Fréchon, Robert-Antoine Pinchon ou George Morren. Elle accorde cependant une importance toute particulière à trois maîtres. Claude Monet est celui qui semble le plus intimement lié à la ville. Lors de ses premiers séjours, en 1872-73, Rouen est avant tout un port, où abordent de grands navires de commerce. Les toiles qu’il y produit constituent un aspect peu connu de ses recherches « aquatiques », juste avant Impression, soleil levant. Il revient dans la ville au printemps 1892 pour y réaliser la première série de ses Cathédrales, la deuxième étant effectuée au printemps de l’année suivante. Cet ensemble mythique, qui constitue l’une des grandes ruptures de l’histoire de l’art, sera parachevé dans l’atelier et daté 1894. L’exposition réunit onze de ces tableaux, chose inespérée en 2010 alors que ces chefs-d’œuvre toujours réclamés voyagent de moins en moins.
Paul GAUGUIN Rue Jouvenet, Rouen, 1884 Huile sur toile Madrid © Collection Carmen Thyssen Bornemisza en dépôt au musée Thyssen Bornemisza La ville de Pissarro, le village de Gauguin
De son côté, Pissarro entame à Rouen une extraordinaire histoire de chambres d’hôtel depuis lesquelles vont être peints, de 1883 à 1898, les chefs-d’œuvre fondateurs du paysage urbain moderne. En 1883 pourtant, Pissarro travaille encore beaucoup à l’extérieur et il trouve ses points de vue sur les deux rives de la Seine. Sa première vision de Rouen est encore faite de rivages paisibles, même si l’agitation urbaine vue de haut l’intéresse comme le montre le chef-d’œuvre du Courtauld Institute de Londres, La Place Lafayette.
C’est en grande partie par le truchement de Pissarro que le jeune Paul Gauguin, qui souhaite quitter Paris, s’installe à son tour à Rouen en 1884, où il séjournera dix mois. Sa production rouennaise, mal connue, pose des questions essentielles sur l’impressionnisme au milieu des années 1880. L’originalité de ces peintures tient aussi au fait qu’il se cantonne dans son quartier résidentiel, ignorant le centre-ville et ne peignant qu’exceptionnellement la Seine. Le Rouen de Gauguin est un village verdoyant et mystérieux, dont le relief très particulier suggère des visions verticales et fermées, dans lesquelles le spectateur a l’impression de s’enfoncer.
PUBLICATION :
Catalogue : Une ville pour l’impressionnisme, Monet, Pissarro et Gauguin à Rouen, introduction par Laurent Salomé, textes de Laurent Salomé, Richard Brettell, Claire Durand-Ruel Snollaerts, Jeanne-Marie David, James Rubin, Claire Maingon, François Lespinasse, Skira Flammarion, 472 pages, 39 €
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