ArtAujourdhui.Hebdo
N° 127 - du 26 mars 2009 au 1 avril 2009
L'AIR DU TEMPS
Osez le dessin !
PARIS - Les spécialistes le disent : un beau dessin vaut mieux qu’un mauvais tableau. Certains passionnés sont prêts à mettre des millions pour une œuvre sur papier, on l’a vu avec le Divan japonais de Seurat parti à 4,4 millions d’euros en décembre dernier chez Sotheby’s. Chaque année, au début du printemps, Paris est l’endroit où il faut être pour faire le tour de la discipline. Le Salon du dessin tient quartier à la Bourse avec 36 galeries et la collection Daniel et Florence Guerlain. Un concurrent assez neuf (c’est sa troisième édition), le Salon du dessin contemporain, plante boutique au Carreau du temple avec une série de poids lourds (Lelong, Lambert, Xippas). Une troisième manifestation, la Foire internationale du dessin, fait son apparition en 2009, centrée autour d’une quinzaine d’artistes. Si l’on ajoute les expositions ad hoc dans les musées, les ventes (voir ci-dessous), l’offre est étendue. En période de crise, une petite esquisse trois crayons, une gouache nerveuse ou une encre de Chine surréaliste : n’est-ce pas le moyen de reprendre goût à l’art de collectionner ?
EXPOSITIONS
Calder parigot
PARIS – Enfin, il revient à Paris ! Sa présence à elle seule justifie, impose une visite à l’exposition ! On veut parler du Cirque, le chef-d’œuvre d’Alexandre Calder réalisé avec des bouts de métal, des cordelettes et du fer blanc, qui fit l’admiration des surréalistes et que Calder transportait dans une valise. Il en donnait des représentations chez ses amis faisant sauter les acrobates et rugir les lions (à revoir dans les films de Jean Painlevé et de Carlos Vilardebo). Le Cirque, qui résume tout à la fois l’errance, le goût de la mécanique, la poésie, l’humour, était depuis plusieurs décennies conservé comme un chef-d’œuvre majeur au Whitney Museum de New York avec interdiction de sortie. A côté de cette pièce maîtresse, l’exposition sur les années parisiennes de l’artiste montre le passage de la sculpture figurative à l’abstraction, qui fera sa célébrité.
La vie côté jazz
PARIS – Il est né dans les bastringues de la Nouvelle-Orléans et il a conquis le monde (un parcours un peu comparable au tango), au point d’influencer durablement les arts plastiques. Le jass (son premier nom) ou jazz fait l’objet d’une exposition de grande ampleur, qui court évidemment un risque : les spécialistes y noteront des manques et les néophytes la trouveront trop foisonnante. Le point de départ conventionnel est 1917 avec le premier enregistrement portant ce nom, le Dixie Jass Band One Step, mais la véritable explosion se produit lorsque le genre traverse l’Atlantique (dès 1918, avec l’orchestre de James Reese Europe). Après Man Ray, ce sont Picasso, Picabia, Van Dongen, Fernand Léger qui s’emparent du sujet, le transmuant en dessins, tableaux, sculptures, qui dessinent le portrait d’une époque. Sans oublier Kupka, Nicolas de Staël, l’affichiste Paul Colin, Cocteau et, évidemment, Matisse, qui intitulera ainsi un cycle complet. Le parcours se clôt sur Chasing the blue train, une grande installation créée en 1989 par David Hammons. Il ne reste plus qu’à finir la journée au caveau des Lombards ou au Petit Journal…
Habits de princes
VERSAILLES – Paris, capitale de la mode. Le sceptre n’est plus si assuré aujourd’hui mais au XVIIIe siècle nul ne l’aurait contesté : c’est surtout en France que les monarques européens passaient commande de leurs costumes, passementeries, broderies, dentelles… L’exposition du château de Versailles, qui s’inscrit dans un cycle sur la vie de cour, réunit des robes, justaucorps et gilets venus de tout le continent : du palais Pitti (Italie), du palais d’Ajuda (Portugal), du château de Rosenborg (Danemark), de l’Ermitage de Saint-Pétersbourg et même de la cathédrale de Cologne, mais aussi des bijoux, des dessins, des gravures. Colbert disait que la mode était à la France ce que les mines d’or étaient au Pérou. Allons, tout n’a pas complètement changé : le mécénat de cette ambitieuse rétrospective est de Chanel.
VENTES
La semaine du dessin
PARIS - Les différents salons du dessin et la traditionnelle Semaine du dessin motivent les maisons de ventes. Plusieurs vacations seront consacrées aux œuvres sur papier. Chez Piasa, le 26 mars, on retiendra notamment une série d’animaux étranges de Pierre-Frédéric Soehnée, élève de Géricault, qui eut une période visionnaire avant de faire fortune dans la fabrication d’un vernis (autour de 5 000 euros). Chez Thierry de Maigret, le 27, on verra un Levy-Dhurmer « commercial » avec un pastel préparatoire pour une publicité de Paribas de 1920 (estimé 12 000 euros). Chez Artcurial, également le 27, dans la dispersion de la collection du baron de Vitta, on note quelques amusantes scènes de harem – éclatantes aquarelles gouachées - d’Albert Besnard (autour de 1 000 euros) et plusieurs Delacroix autrement plus chers.
L'ARTISTE DE LA SEMAINE
Richard Orlinski, Born Wild rouge, sculpture en polyrésine. Edition rouge signée et numérotée sur 500. Dimensions : 46x42x110 cm. Courtesy galerie Pierre Cardin, Paris.
Richard Orlinski, l’homme au crocodile
Son ascension ne doit guère aux galeries mais plutôt aux maisons de ventes, ce qui est un cas de figure assez rare. Les stars de l’art contemporain français que sont Xavier Veilhan, Mathieu Mercier ou Gilles Barbier ne comptent respectivement que 10, 21 ou 18 résultats aux enchères. Lui, Richard Orlinski (né en 1966), snobé par la critique, en compte 22. La réputation de l’artiste repose cependant sur un filon, celui du crocodile. Emblème d’un monde sans pitié ? Le saurien rouge d’un mètre de long, qui a été produit en polyrésine à plusieurs centaines d’exemplaires, et qui a commencé sa carrière en février 2007 à 1900 euros chez Massol, a été revu sous divers avatars, en noir, en aluminium, en or, jusqu’à 30 000 euros chez Tajan ou chez Artcurial. En pleine crise, le 8 décembre 2008, de nouveau chez Massol, l’une de ses œuvres, Skull, a atteint l’estimation haute de 50 000 euros. Il y a donc une vie après le crocodile.
LIVRES
Le grand voyage des puces
C’est le retour de la belle saison donc le moment de fréquenter les puces… On connaît bien sûr Vanves et Saint-Ouen, éventuellement le Sablon à Bruxelles, Portobello Road à Londres, la romaine Porta Portese, chantée par Baglioni, le Rastro madrilène mais la liste peut être allongée à l’envi. Pourquoi ne pas profiter des ponts de mai pour aller voir ce que proposent les autres grandes capitales ? Ce guide recense 40 marchés aux puces, du Flohmarkt viennois où l’on aurait récemment déniché la seringue à cocaïne de l’impératrice Sissi, au temple Toji de Kyoto, riche en kimonos et lanternes de papier. Dans l’intervalle, on aura aussi eu un éclairage sur Monastiraki à Athènes, Waterloopplein à Amsterdam, le Garage de New York ou la Lagunilla de Mexico. Azulejos à Lisbonne, malles cabines à Genève, siphons et cannes à pommeau à Buenos Aires : ce cosmopolitisme n’est-il pas délicieux ?
BRÈVES
FRANCE – A l’initiative du SYMEV (Syndicat national des maisons de ventes volontaires), un week-end « Follement marteau » avec enchères caritatives et animations diverses est organisé dans un grand nombre de maisons de ventes les 28 et 29 mars 2009.
LA LOUVIÈRE (Belgique) – La première pierre de l’extension du Centre de la Gravure et de l’image imprimée, dessinée par l’architecte Erwin Spitzer, est posée le 27 mars 2009.
LONDRES – La vente de la collection d’art du couturier Gianni Versace chez Sotheby’s a rapporté 7 millions £ soit l’estimation basse. Une paire de lutteurs de Canova a décuplé son estimation à 433 250 £. Le Portrait du major George Maule de Johann Zoffany a été retiré de la vente à la demande d’un descendant du modèle, qui affirme que le tableau a été volé.
PARIS – Le 13e Pavillon des arts et du design, qui met cette année l’accent sur le design italien, réunit 80 exposants dans le Jardin des Tuileries du 1er au 5 avril 2005.
PARIS – Les quatre artistes nommés au prix Marcel Duchamp 2009 sont Saadane Afif, Damien Deroubaix, Nicolas Moulin et Philippe Perrot.
PRAGUE – Les ministres de la Culture de l’Union européenne se réunissent les 26 et 27 mars 2009 sous la présidence tchèque dans le cadre d’un Forum pour l’Europe créative.
SUR ARTAUJOURDHUI.INFO
Cette semaine, ne manquez pas
ANDRÉ MAIRE
BEAUVAIS - André Maire (1898-1984) est une grande figure de la peinture décorative du XXe siècle. Le musée départemental de l'Oise suit les errances de ce peintre voyageur, gendre d'Emile Bernard, qui vécut à Venise, en Espagne, en Egypte, à Madagascar et fut l'un des premiers à retranscrire la magie d'Angkor.
RALPH-SAMUEL GROSSMANN LE MONDE VOILÉ
ROUEN - Comment conjuguer émotion esthétique et imaginaire de la science face à la nature ? C'est la question que se pose Ralph Samuel Grossmann au musée des Beaux-Arts de Rouen au moyen de larges images de ciels nuageux, sculptures-assemblages de fragments naturels et de modélisations scientifiques.