ArtAujourdhui.Hebdo
N° 137 - du 4 juin 2009 au 10 juin 2009
L’AIR DU TEMPS
Biennale sans sexe
VENISE – C’est la plus vieille biennale du monde et elle continue de battre des records: pour cette édition 2009, 77 représentations nationales sont recensées, de l’Argentine au Venezuela, en passant par le Gabon, l’Islande et la Lettonie. Autre record, celui des événements «collatéraux» : ils sont au nombre de 38, dont «Save the Poetry» et «Palestine c/o Venise», ou l’ouverture très attendue du centre d’art contemporain Punta della Dogana de François Pinault, dessiné par Tadao Ando, et du musée Vedova, signé Renzo Piano. Et la liste n’est pas close : certains événements ne rentrent dans aucune de ces catégories. C’est le cas des «100 sexes d’artiste», un projet que l’artiste belge Jacques Charlier mène depuis 1973, dans lequel il essaie de donner une forme (largement symbolique et caricaturale) aux sexes de Duchamp, Pollock et autres. Les organisateurs ont trouvé l’idée - pourtant officiellement appuyée (et financée) par la Communauté française de Belgique et déjà présentée dans plusieurs musées européens - trop offensante pour le «sens commun de la pudeur». Proscrits sur la terre ferme, les cent sexes ont trouvé un refuge flottant. Ils se baladent sur la lagune à bord d’un bateau lubrique, qui jettera tout de même l’ancre devant Saint-Marc. Sur un quai tout choisi : celui des Martyrs…
EXPOSITIONS
Matisse, l’âge moyen
MADRID – Le présupposé des organisateurs est clair : le Matisse des avant-gardes (antérieur à la Première Guerre mondiale) est très souvent montré, le Matisse de la fin (les papiers découpés) également. Le Matisse de l’entre-deux souffre d’un déficit d’image… d’où le découpage chronologique choisi, 1917-41, illustré par près de 80 œuvres – peintures, dessins mais également sculptures – provenant d’une cinquantaine d’institutions différentes. Avec la crise et la disparition de ses clients russes, qui lui commandaient d’immenses compositions, Matisse décide de s’isoler dans la lumière de Nice. Il vit quelques « passages à vide », comme au début de la décennie 1930, où il passe plusieurs années sans peindre de tableaux de chevalet. Mais il remet sans cesse son talent sur le métier, cherchant dans la pratique du dessin, dans le nu, dans les thèmes du balcon et de la fenêtre, dans les motifs géométriques de l’Islam, des voies nouvelles. En 1941, il manque succomber à une grave opération. Il survit et ses douze dernières années constitueront un chapitre entièrement nouveau…
Cherchez l’homme
PARIS – Oui, cherchez l’homme : vous ne le trouverez pas. Mais plutôt Sonia Delaunay, Joan Mitchell, Vieira da Silva, Frida Kahlo, Louise Bourgeois, Sophie Calle… Le nouvel accrochage de la collection du Musée national d’art moderne se veut révolutionnaire. Comme le soulignent les commissaires, jamais le fonds permanent d’une grande institution n’avait présenté que des artistes femmes. C’est sans doute vrai même si l’on a déjà vu des initiatives comparables. Ainsi, à New York, le Brooklyn Museum a-t-il ouvert il y a deux ans le Sackler Center for Feminist Art, qui mêle une installation de Judy Chicago et des expositions temporaires. Paris prend maintenant les devants, les Guerilla Girls doivent se frotter les mains. Etait-ce pourtant si nécessaire ? On sait depuis longtemps qu’il existe de grand(e)s artistes femmes. On imagine aisément la levée de boucliers qui aurait accompagné l’annonce d’une collection « men only ». En cette occasion, c’est paradoxalement l’absence de réaction hostile qui montre le chemin restant à parcourir vers la parité…
Les passions bretonnes de Maurice Denis
PONT-AVEN – Natif de Granville, Maurice Denis noue un rapport étroit avec la Bretagne dès 1888, dans le cadre de l’école de Pont-Aven, de son admiration pour Gauguin et de son amitié pour Sérusier (avec qui il fondera le mouvement Nabi). Ce lien sera durable même s’il changera de foyer. Désormais converti au classicisme, Maurice Denis délaissera Pont-Aven et séjournera en famille à Perros-Guirec. Il y achètera en 1908 la villa Silencio, où feront notamment escale Gide et Valéry. L’exposition, qui tire le bilan de cette inspiration bretonne, est présentée en deux volets : à Pont-Aven, les œuvres synthétistes, clairement influencées par Gauguin ; au domaine de la Roche Jagu, les toiles postérieures, dont certaines, provenant de la famille, n’ont jamais été présentées au public : vues de plages, de calvaires ou compositions sacrées comme ce Magnificat de 1909.
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VENTES
Images pieuses
PARIS - Une Vierge de l’Assomption en broderie sur soie (XIXe siècle), des angelots polychromes typiques de l’art colonial espagnol, un Christ en ivoire dans son cadre cintré, une Sainte Femme au livre sculptée dans du bois tendre (XVIIIe siècle). Voilà des lots qui ne se situent pas exactement au cœur de l’art contemporain mais qui ont été pendant des siècles l’une des expressions majeures de l’art populaire. La vente de l’étude Collin du Bocage réunit des œuvres réalisées sur un demi-millénaire, débutant à une centaine d’euros (porte-cierge en bronze patiné du XVIIIe siècle, plat de quête, bénitier en pierre), progressant quelque peu pour des tableaux pieux du XIXe siècle ou du mobilier travaillé (comme cette porte de tabernacle en noyer sculpté du XVIIe siècle, estimée 400 euros) et pouvant monter beaucoup plus haut : 6 000 euros pour une Vierge de profil sur une plaque d’émail limousin, 15 000 euros pour une statue en calcaire de Catherine d’Alexandrie foulant au pied l’empereur Maximien, 20 000 euros pour le Christ portant sa croix par Leandro Bassano, jusqu’à 45 000 euros pour cette Vertu dénudée par l’amour en bois de buis, sculptée en Allemagne vers 1600.
L'ARTISTE DE LA SEMAINE
Joël Brisse, Séquence, 2007, huile sur toile, 20 x 120 cm, courtesy galerie Claire Gastaud, Clermont-Ferrand
Joël Brisse : ambiance cinéma
CLERMONT-FERRAND - Il est peintre, certes (diplômé de l’Ecole d’arts de Clermont-Ferrand), mais a cueilli ses plus beaux lauriers dans le domaine du cinéma (notamment un premier prix au festival d’Uppsala en 2001 pour son court-métrage La pomme, la figue et l’amande). On sent clairement cette influence dans les œuvres présentées à la galerie Claire Gastaud. Elles se présentent sous forme de « séquences » comme autant de fragments de story-board décrivant des scènes ternaires. Lesquelles sont toujours figuratives, colorées, avec des personnages pris dans des actions simples – marcher, regarder, attendre. Actions simples et comme hésitantes, légèrement figées, à l’exception de l’homme décidé qui empoigne une lance à incendie… Une peinture à l’huile, à mi-chemin entre le narratif et l’existentiel, qui appelle le jeu des interprétations.
LIVRES
Saura par Saura
Frère du cinéaste Carlos Saura, Antonio Saura a produit au cours de sa vie (1930-1998) une œuvre foisonnante, mêlant la peinture, le dessin, la photographie et l’écrit, marquée par des polémiques retentissantes (à l’image du pamphlet Contre Guernica, publié au moment de l’arrivée en Espagne de l’œuvre de Picasso). Pour décrypter son mode opératoire (grattages, superpositions, accumulations), son utilisation d’un grand répertoire d’images (reproductions de maîtres du passé, images des camps de concentration, photos de pin-ups) et la succession de ses thèmes favoris (les dames, les crucifixions, les foules, les suaires, etc…), il est lui-même le meilleur guide. Cet ouvrage rassemble les « gloses » écrites par Saura au cours de sa carrière, qui constituent une véritable œuvre littéraire, à la fois documentaire et poétique. L’ensemble est très largement illustré.
BRÈVES
BERLIN – Le Festival international du design se tient du 3 au 7 juin 2009. Il comprend, outre des manifestations variées dans les showrooms, une exposition à l’Arena Berlin, consacrée aux jeunes designers.
BERLIN – Le 7e festival international de sculpture sur sable se tient à partir du 7 juin 2009 à Humboldthafen, près de la gare de Hauptbahnhof.
BRUXELLES – La BRUNEAF (Brussels non European Fair) se tient du 3 au 7 juin 2009 au Grand-Sablon, en même temps que deux autres manifestations, la BAAF (Brussels Ancient Art Fair) et la BOA (Brussels Oriental Fair).
PARIS – L’Affordable Art Fair, réunissant 80 galeries et des œuvres d’art à moins de 5000 euros, se tient du 4 au 7 juin 2009 à l’Espace Champerret.
ROME - Le mur d'enceinte du site de l'Ara Pacis, aménagé par l'architecte Richard Meier, a été vandalisé avec de la peinture (aux couleurs de l'Italie) le 1er juin 2009.
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TEXTILES D’AFRIQUE DE L’OUEST
LABASTIDE-ROUAIROUX - Le musée du Textile présente la collection de l'anthropologue Anne Grosfilley, qui donne une vue d'ensemble de la riche production textile d'Afrique de l'Ouest. Du batifk au wax, de l'adinkra à l'indigo, quelques mots-clés aident à mieux comprendre une activité toujours très vivante.
FRANCHE-COMTÉ ET PREMIER ART ROMAN
SAINT-CLAUDE - En se fondant sur les recherches les plus récentes et en étendant son rayon de l'Italie à la Bourgogne et à la Catalogne, le musée de l'Abbaye dresse un état des lieux de l'architecture romane en Europe autour de l'an Mil, en s'attardant sur les techniques de construction et les éléments de décor.
FÉERIE INDIENNE Les toiles peintes, des rivages de l’Inde au royaume de France
La Rochelle - A partir de ses collections et de celles du musée de l'Impression sur étoffes de Muhouse, le musée de la Compagnie des Indes invite à redécouvrir la richesse des cotonnades indiennes, qui émerveillèrent les Européens du XVIIe siècle.
DE NEIGE, D'OR ET D'AZUR Chu Teh-Chun et la Manufacture de Sèvres
PARIS - Premier artiste français d'origine chinoise élu à l'Académie des Beaux-Arts, Chu Teh-Chun conjugue son talent à celui de la Manufacture de Sèvres. Le résultat : 56 vases peints de sa main, présentés au sein des collections du musée Guimet.