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N° 197 - du 9 décembre 2010 au 15 décembre 2010


House of Wonders, musée de Zanzibar (photo Bertrand Rieger)

L'AIR DU TEMPS

Mon musée à Zanzibar

La dictature de l’actualité impose aux musées de faire sans cesse du neuf. Symbole de cette toute puissance de l’éphémère, qui aurait bien surpris les collectionneurs du passé : l’exposition temporaire. Au Louvre, au Prado, au Metropolitan, elle alimente les finances et sert d’aimant vers le fonds permanent. Les structures qui n’ont pas les moyens de s’offrir ces rétrospectives à l’obsolescence rapide sombrent doucement dans une seconde division : budget limité, faible fréquentation, présentation vieillie. Le dépaysement y est paradoxalement plus fort tant le temps s’y est figé dans un hier indéfinissable. En Tanzanie, l’un des pays les plus pauvres du monde, la House of Wonders de Zanzibar est un exemple parlant. Si 300 000 touristes visitent chaque année l’île aux épices, dont la Vieille Ville est inscrite au patrimoine de l’Unesco, ils sont trop pressés par l’impératif balnéaire pour profiter de ce délicieux bric-à-brac, bombardé lors de la plus courte guerre de l'histoire (45 minutes en 1896), où voisinent un boutre grandeur nature, des khangas (pièces d’habillement féminin), des intérieurs reconstitués, quelques couteaux de pêcheurs. Au fond, le prototype de ce qui devrait ravir le voyageur curieux : le musée où il ne se passe rien.

EXPOSITIONS

Peindre la Méditerranée

GÊNES – La fascination pour la Méditerranée a longtemps été alimentée par son rôle dans l’Antiquité romaine. Les adeptes du Grand Tour, au XVIIIe siècle, allaient à la recherche des traces de Virgile et de la Sibylle… Ce n’est que récemment, avec Courbet, Corot puis Van Gogh, que la côte française a connu un traitement aussi favorable. En 80 tableaux provenant du monde entier, l’exposition dresse un panorama des principales écoles et mouvements – impressionnisme, pointillisme, fauvisme – qui en ont fait un motif récurrent. Les toiles de Monet, Cézanne, Bonnard - efficacement relayés par des peintres « secondaires » comme Loubon, Ziem ou Monticelli - ont contribué à faire de la Provence un des paysages emblématiques de l’art moderne.
Mediterraneo, da Courbet a Monet a Matisse au Palazzo Ducale, du 27 novembre 2010 au 1er mai 2011.

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Quand la Chine habillait l’empereur

LONDRES – Le bleu pour représenter le ciel, le jaune pour la terre, le rouge pour le soleil, le bleu pâle pour la lune : chez les empereurs chinois Qing (1644-1911), la symbolique des couleurs était clairement codifiée. Puisant dans les trésors du musée du Palais, au cœur de la Cité interdite, le Victoria & Albert Museum montre la richesse de l’habillement de la dynastie mandchoue : habits de voyage, de représentation, de vie familiale, vestes de concubines ou costumes « dragon », tenues de chasse et armures cérémonielles… La qualité de la manufacture frappe : aciers, coton, satin ou soie que des ateliers du sud de la Chine produisaient sur des métiers centenaires. Ces traditions vestimentaires étaient encore vivaces aux débuts de la photographie, comme le prouvent les images de l’impératrice en veste d’équitation ou arborant une parure de tête (dianzi). L’arrivée du métier mécanique à la fin du XIXe siècle et la chute des Qing en 1911 mettront un terme à cette débauche de tissus et d’ornements précieux.
Imperial Chinese Robes au Victoria & Albert Museum, du 7 décembre 2010 au 27 février 2011.

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André Masson, Le Météore, 1939, Huile sur toile, 64.8 x 81.3 cm, Collection particulière, Photo Maurice Aeschimann. © 2010, ProLitteris Zurich

Collection de famille

MARTIGNY (Suisse) – Peu de musées accepteraient de prêter leurs œuvres pour une durée aussi longue – six mois. Il y a donc une explication toute simple à cette exposition : elle est consacrée à une collection privée suisse, qui a souvent contribué aux rétrospectives de la Fondation Gianadda. On reverra donc des tableaux déjà montrés comme Julie au violon de Berthe Morisot ou les Blanchisseuses de Degas. Mais l’essentiel des 120 œuvres sera inédite et montrera comment un collectionneur peut constituer un ensemble cohérent sans forcément suivre une école ou une thématique particulière. L’espace couvert est impressionnant, des Nymphéas de Monet aux huiles de Bonnard, de la troisième version du Mystère catholique de Maurice Denis aux gouaches de Dufy et aux aquarelles de Signac sur les ports de France, en finissant par les grands pastels virtuoses de Sam Szafran, représentant des plantes grasses ou des escaliers… Le fil directeur annoncé est la « couleur » mais on peut tout aussi bien en distinguer un autre : une relecture personnelle de l’art du dernier siècle.
De Renoir à Sam Szafran à la fondation Gianadda, du 10 décembre au 12 juin 2011.

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Artaujourdhui vous conseille aussi

• Dans Deux visions du cantique des cantiques, le musée national Marc Chagall, à Cannes, présente les versions du texte biblique dues à Chagall et à Kupka. Jusqu’au 14 mars 2011.

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• A Edimbourg, la National Scottish Gallery of Modern Art consacre une salle à Alasdair Gray, l’un des artistes les plus polyvalents (peintre, écrivain, scénographe) et influents du dernier demi-siècle en Ecosse. Jusqu’au printemps 2011.

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• A Madrid, la Fondation March dédie la première rétrospective européenne à Asher B. Durant (1796-1886), peintre virtuose du paysage nord-américain. Jusqu’au 9 janvier 2011.

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VENTES

Trop de notes…

LONDRES – Phillips de Pury, vénérable maison anglaise dont Bernard Arnault prit un temps le contrôle en espérant en faire l’égale de Christie’s (détenue par son rival François Pinault), s’était depuis quelques années habituée à un rôle de faire-valoir. La vente « Carte blanche » d’art moderne et contemporain du 10 novembre passé, concoctée par le marchand Philippe Ségalot et qui a rapporté 143 millions $, l’a remise sur les rails. Dans cette recherche d’une personnalisation marquée de ses vacations, Phillips de Pury propose une séance Music à Londres. Elle sera composée, comme son nom l’indique, d’œuvres inspirées par la musique, d’un violoncelle brisé d’Arman aux œuvres conceptuelles de Martin Creed et John Armleder, en passant par le mythique portrait du leader des Doors, Jim Morrison, torse nu, par Joel Brodsky. La piste thématique sera exploitée à fond avec une mise en rythme confiée aux DJ de Hot Chip…
Music Sale chez Phillips De Pury (Howick Place) le 10 décembre 2010.

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L'ARTISTE DE LA SEMAINE


Ellen Kooi, Noordwijk - Bessen, 2009. © Galerie Filles du Calvaire

Les paysages mentaux d’Ellen Kooi

Elle fait partie de la nouvelle vague de la photographie d’Europe du Nord, qui joue de couleurs stridentes, d’ambiances énigmatiques, avec une nature omniprésente mais toujours sous la sourde menace des humains. Née en 1963, Ellen Kooi semble arriver au sommet : représentée dans de nombreuses collections privées et publiques (du Fonds national d’art contemporain à la Rabobank), elle doit faire l’objet en 2011 de rétrospectives au Château d’Eau à Toulouse et au Stedelijk Museum d’Amsterdam. L’Institut néerlandais présente une sélection de son travail où est évident son goût pour la mise en scène (avec une prédilection pour les angles en contre-plongée, à la Hitchcock). Une véritable atmosphère émerge de ses images très travaillées, où le symbolisme (enfants trop grands, fleurs trop vertes, personnages trop seuls) a facilement un arrière-goût de cauchemar.
• Ellen Kooi est présentée à l’Institut néerlandais (121 rue de Lille, 75007) jusqu’au 22 décembre 2010. Catalogue Filigranes.

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LIVRES

Chefs-d’œuvre de province

L’intention est louable : il s’agit de porter l’attention sur ces œuvres majeures qui, pour la seule raison qu’elles ne sont pas la propriété d’un grand musée, ne bénéficient pas de la réputation qu’elles mériteraient amplement. L’inspiration est raffinée : l’auteur se souvient des causeries radiophoniques de Sacha Guitry, entendues dans l’enfance, dans lesquelles il décrivait sur ses « cent merveilles ». Le choix est bon : accrochés à Grenoble, Douai, Valenciennes, Tourcoing ou Albi, voici un portrait par Jean Clouet, une Apothéose de Simon Vouet, des ruines de Dresde rendues par Bernardo Bellotto grâce à la chambre noire, un Café de 1914 par Alberto Magnelli. Il ne manque que deux choses à cette agréable promenade : une carte de France permettant de situer les musées évoqués et une mention qu’exige l’esprit de curiosité - comment ces chefs-d’œuvre sont-ils arrivés à destination ? Distribution des autorités révolutionnaires, saisies napoléoniennes, legs de grands collectionneurs ? Ce sera au lecteur de finir l’enquête…
100 chefs-d’œuvre méconnus des musées de France par Jean-Luc Chalumeau, éditions du Chêne, 2010, 240 p., 35 €.

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BRÈVES

LONDRES – Le prix Turner d’art contemporain, décerné sous l’égide de la Tate Gallery, a été attribué à Susan Philipsz pour son installation sonore Lowlands.

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LONDRES – Un exemplaire du livre Birds of America de John James Audubon a été vendu 8,3 millions £ chez Sotheby’s le 7 décembre 2010, devenant ainsi le livre le plus cher de l’histoire des enchères publiques.

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MADRID – Le vol commis dans un entrepôt de Getafe (banlieue de Madrid) et révélé le 2 décembre 2010 est le plus important jamais réalisé en Espagne. Il comprend 30 œuvres de maître internationaux, dont Picasso, Tapies et Botero.

Voir l’article sur masdearte.com

MOSCOU – La Maison de la Photographie de Moscou est réinaugurée, après cinq ans de travaux, le 9 décembre 2010, sous l’appellation de MAMM (Multimedia Art Museum Moscow). Le MAMM, qui conserve 88 000 œuvres, disposera de 11 salles d’exposition sur 9000 m2.

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WASHINGTON – Le retrait d’une vidéo de David Wojnarowitz Fire in my Belly d’une exposition de la National Portrait Gallery, au motif qu’elle était «anti-chrétienne», suscite une violente polémique aux Etats-Unis.

L’article sur le Washington Post

SUR ARTAUJOURDHUI.INFO

Cette semaine, ne manquez pas

VINCENT BARRÉ ET SYLVAIN DUBUISSON

ROUEN - Le musée des Beaux-Arts propose la première exposition réunissant l’architecte et designer Sylvain Dubuisson et le sculpteur formé à l’architecture Vincent Barré. L'événement prend la forme d'une véritable immersion des deux artistes au sein du musée et de ses collections.

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