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N° 298 - du 4 avril 2013 au 10 avril 2013


Jean-Luc Martinez © Musée du Louvre 2013/Antoine Mongodin

L'AIR DU TEMPS

Une nouvelle tête pour le Louvre

Quatre mois : c’est le temps qu’il a fallu pour dénouer l’épineuse succession du Louvre, une fois connu le souhait d’Henri Loyrette de ne pas se représenter. Une durée curieusement identique à celle de l’affaire Cahuzac, dont le pourrissement subit a sans doute poussé l’exécutif à ne prendre aucun risque. Les outsiders n’ayant plus le vent en poupe, le nouveau patron du Louvre, Jean-Luc Martinez, 49 ans, nommé le 3 avril 2013, vient de la maison. Directeur du département des antiquités grecques, étrusques et romaines, il s’est fait connaître par ses compétences scientifiques et par son souci d’accueillir des publics nouveaux (lui même a enseigné dans des banlieues en déshérence culturelle). Le défi à relever, après 12 ans de présidence Loyrette, est évidemment significatif. Il faut réussir la greffe à Lens (ce qui devrait lui être facile, Jean-Luc Martinez ayant eu la responsabilité de la première exposition permanente), consolider la bouture à Abu Dhabi (la première exposition, Birth of a Museum, y est programmée pour le 22 avril) et repenser l’accueil dans un musée qui vient de dépasser les 10 millions de visiteurs annuels. En période de ralentissement économique, le nouvel homme fort devra faire la preuve de ses talents de fundraiser, désormais indispensables aux dirigeants de grands établissements culturels, pour que son musée continue à manifester une qualité première : l’ambition.

EXPOSITIONS


Auguste Rodin, Coupe et buste. Plâtre et céramique antique, 23 x 25,7 x 18,5 cm. Coll. et © musée Rodin, Paris.

Rodin, homme de l’Antiquité

Trois fois il fut recalé au concours des beaux-arts et ne put donc faire le voyage traditionnel de formation en Italie auquel ont droit les postulants au prix de Rome. Pourtant, Rodin (1840-1917) est peut-être l’artiste de la seconde moitié du XIXe siècle le plus lié à l’art antique. La faute au Louvre, où il passa des jours entiers et où la faiblesse de ses moyens ne lui donna guère l’occasion que de griffonner sur papier. Cette passion s’illustra sur le tard par une extraordinaire collection personnelle, mêlant tanagras, coupes en céramique et bustes issus des fouilles de l’époque. L’exposition renoue pour le public ces liens privilégiés sur un principe facilement intelligible de rapprochement, mettant côte à côté des moulages (Apollon du Belvdère, Vénus de Milo) ou des pièces authentiques (tête Warren de Boston, Diadumène du British Museum, Vénus d’Arles du Louvre) et des œuvres de Rodin. Le clou en est la rencontre du Monument à Victor Hugo et du célèbre Laocoon. Il ne s’agit pas de l’original du Vatican, dont le prêt est inimaginable, mais l’impressionnante copie (trois tonnes) faite pour Louis XIV, qui quitte pour la première fois les bosquets de Versailles.
Rodin, la lumière de l’antique au Musée départemental Arles antique, du 6 avril au 1er septembre 2013.

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Ces expositions ouvrent aussi cette semaine…

Méliès, l’homme aux 500 films

BARCELONE – Cinq ans après la rétrospective de la Cinémathèque française, Georges Méliès, l’un des pionniers du cinéma, réalisateur et producteur de 500 films entre 1896 et 1912, fait le plein au CaixaForum. Du 5 avril au 24 juin 2013.

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Les mystères des Philippines

PARIS - Philippines, archipel des échanges, au musée du quai Branly, est une plongée dans la riche culture d’un pays aux sept mille îles et aux 100 millions d’habitants. Du 9 avril au 14 juillet 2013.

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Ballet architectural franco-allemand

STRASBOURG – Au musée d’Art moderne et contemporain, Interférences, 1800-2000 étudie le parcours des architectures française et allemande au long de deux siècles. Du 30 mars au 21 juillet 2013.

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VENTES


Lot 356. Edouard Vuillard (1868-1940), Bécane. Affiche. Vers 1894. Lithographie. [595 x 810]. Estimation : 2200-2500 €.

Estampe, valeur de crise

PARIS - Un Vuillard pour 2500 €, ce n'est certes pas commun. En l'occurrence, il ne s'agit pas d'une découverte sensationnelle dans une brocante mais d'une simple lithographie, consacrée à Bécane, une liqueur en vogue à la fin du XIXe siècle. Et pour un Matisse, cette Jeune fille en robe fleurie au col d'organdi? Même histoire : tout dépend de la place de l'œuvre dans le parcours de l'artiste (pour un même sujet, il peut y en avoir plusieurs états), de la qualité de la gravure (rousseurs, épidermures, manques, présence des marges, type de papier influent sur le prix), du nombre d'exemplaires… On verra dans cette vente des Rembrandt, des Callot, des Goya pour quelques centaines d'euros. Pour un très bel Arc gothique de Piranèse, il faudra au contraire approcher des 10 000 €. Le marché de l'estampe ne connaît évidemment pas les inflations qui marquent l'art contemporain ou les avant-gardes historiques au moment de leur redécouverte (comme pour l'Art déco dans les années 1970). Il attire un public motivé et connaisseur - c'est souvent l'antichambre des bonnes collections !
Estampes à Richelieu-Drouot le 5 avril 2013 (Piasa)

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L'ARTISTE DE LA SEMAINE

Geneviève Asse au fond du bleu

C’est une grande dame de l’art français qui est exposée dans une grande galerie… Geneviève Asse, née en 1923, est chez Claude Bernard, qui tient boutique depuis 1957, rue des Beaux-Arts, où il a montré Giacometti, Bacon et Raymond Mason. L’artiste porte en elle la mémoire du XXe siècle : ambulancière pendant la guerre, elle participera à l’évacuation du camp de concentration de Terezin, en Tchécoslovaquie. Dans l’effervescence créatrice de la Libération, elle côtoiera Poliakoff, de Staël ou encore Samuel Beckett. C’est en prenant de l’âge que son penchant pour « l’informel » s’accentuera. Depuis trente ans, elle ne peint quasiment qu’en bleu-gris, la couleur de la Bretagne où elle vit une partie de l’année. Amateur de genres considérés comme « mineurs » ou « appliqués », Geneviève Asse a réalisé des motifs pour des manufactures de tissus, des vitraux (notamment pour la cathédrale de Saint-Dié), des gravures. Elle présente à la galerie de récentes huiles sur toile, qui montrent une activité toujours aussi soutenue.
• Geneviève Asse à la galerie Claude Bernard (7/9 rue des Beaux-Arts, 75006 Paris), du 4 avril au 18 mai 2103.

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• A voir aussi : l’un des découvreurs de Geneviève Asse fut l’industriel textile Jean Bauret, qui lui commanda des maquettes dans les années quarante. L’exposition « Ateliers Bauret / Un esprit de famille » à la galerie Baudoin-Lebon (jusqu’au 13 avril 2013) montre la « descendance » artistique de l’industriel, en particulier son fils Jean-François, photographe né en 1932, qui a réalisé plusieurs portraits de Geneviève Asse.

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LES VERNISSAGES DE LA SEMAINE

LIVRES

Le romantisme qui fait peur

Le romantisme qui nous est familier est plutôt sage : des hommes mélancoliques cheveux au vent (Chateaubriand par Girodet), des personnages solitaires dans un cadre sublime de beauté (chez Friedrich par exemple). Il en est un autre, peuplé de créatures effrayantes (succubes, fantômes et autres monstres), dans une nature vénéneuse et étouffante, où tout semble animé d’une vie souterraine. C’est celui qu’explore le musée d’Orsay dans une exposition (jusqu’au 6 juin 2013) et ce catalogue qui l’accompagne. On connaît ses interprètes majeurs : Böcklin, Füssli, Goya ou Blake. Mais l’occasion permet d‘en (re)découvrir d’autres moins souvent exposés, des incendies homériques de John Martin aux processions lugubres d’Ernst Ferdinand Oehme, des villes mortes de Degouve de Nuncques aux vanités de Léon Frédéric. La filiation de ce romantisme noir, satanique, est suivie à la trace jusque chez Kubin, les surréalistes et même le cinéma de l’entre-deux-guerres : le Nosferatu de Murnau et le Dracula de Tod Browning en sont de dignes héritiers !
L’ange du bizarre, le romantisme noir, ouvrage collectif sous la direction de Côme Fabre et Felix Krämer, Haje Cantz, 2013, 304 p., 45 €.

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