ArtAujourdhui.Hebdo
N° 303 - du 9 mai 2013 au 15 mai 2013
A gauche : Sid Vicious, 1977. Courtesy The Metropolitan Museum of Art, Photo © Dennis Morris - Tous droits réservés. A droite : Karl Lagerfeld pour Chanel, 2011. Vogue, March 2011. Courtesy The Metropolitan Museum of Art, Photo David Sims.
L'AIR DU TEMPS
Les punks entrent au Metropolitan
NEW YORK - Où commence et où finit l’art ? La question est banale et a été posée cent fois. Dans cette redéfinition permanente des frontières, les grands musées jouent un rôle moteur. De mémorables expositions sur le cinéma, la bande dessinée et le design ont contribué à adouber à part entière ces genres. Des rétrospectives sur la littérature et la mode ont contribué à de salutaires hybridations. Dans ce domaine, le Metropolitan Museum of Art n’a pas froid aux yeux. Quelques jours après avoir annoncé la méga-donation de Ronald Lauder (une collection cubiste estimée à un milliard de dollars), il inaugure une exposition audacieuse sur la mouvance punk et son influence sur la mode. On y voit des photos de Sid Vicious, l’éphémère porte-drapeau des Sex Pistols, de Patti Smith ou des Ramones. Mais aussi et surtout tout ce que ce mouvement rangé sous l’étiquette « No Future » a pu inspirer à des créateurs comme Jean-Paul Gaultier, Vivienne Westwood ou, plus près de nous, Viktor & Rolf ou Miuccia Prada. L’Art déco avait attendu un demi-siècle avant d’être redécouvert, l’art punk n’aura patienté que la moitié. C’est un fait, l’histoire s’accélère…
• Punk : Chaos to Culture au Metropolitan Museum of Art, du 9 mai au 14 août 2013
EXPOSITIONS
Paulus Moreelse, Portrait d'un jeune garçon, 1634, huile sur toile. Royal Collection © Her Majesty Queen Elizabeth II
Collet monté chez les Tudor
LONDRES - Autrefois les petits garçons aussi portaient des robes… et la dictature de la mode n’est pas née d’hier. Ces évidences sont particulièrement bien mises en avant dans cette sélection des collections royales, témoignant des splendeurs de la cour des Tudor et des Stuart. Véritable accumulation de sang bleu, elle montre Anne de Danemark, la grande Elizabeth, Charles II ou Marie de Modène mais aussi des portraits de bourgeois enrichis comme ce petit garçon engoncé dans sa robe et tenant un hochet en corail pour se faire les dents. La somptuosité des matières – dentelles, taffetas, fraises, galons et tissus d’or – est reproduite scrupuleusement par les peintres mais ne leur vaut pas toujours les bonnes grâces des souverains. On apprend ainsi que Charles Ier fut « faché contre le painter Vandec » (Van Dyck !) pour avoir représenté son fils en jupe et non en pantalon comme il aurait dû l’être, ayant passé les cinq ans fatidiques… Holbein, Steen, Hoskins, Rembrandt et Pourbus sont quelques-uns des grands noms qui firent à l’époque œuvre de reporters de l’histoire.
• In Fine Style : the Art of Tudor and Stuart Fashion à la Queen’s Gallery, du 10 mai au 6 octobre 2013.
Ces expositions ouvrent aussi cette semaine…
BERLIN – Le Museum fur Fotografie se penche sur la Photographie de nu autour de 1900. Du 3 mai au 25 août 2013.
BRUGES – Fabienne Verdier, hommage aux maîtres flamands montre au Groeningemuseum la fascination de l’artiste, davantage connue pour ses liens avec l’Extrême-Orient, pour Van Eyck ou Memling. Du 4 mai au 25 août 2013.
MILAN - Cesare Zavattini (1902-1989) fut un grand scénariste du cinéma italien mais aussi un collectionneur et peintre, qui ne s’intéressait qu’à un seul format (8x10 cm), dont il posséda une collection de 1500 œuvres. Dans cette série, la Pinacoteca di Brera montre une série de 152 autoportraits qu’elle a pu acquérir l’an dernier. Du 7 mai au 8 septembre 2013.
L'ARTISTE DE LA SEMAINE
Susan Hefuna, Un exemplaire d’une série de 3 dessins, NYC, 2011, Feutre, gaze, crayon, couture, 56 x 60 x 4 cm. Collection Florence et Daniel Guerlain, Les Mesnuls. Photo André Morin.
Susan Hefuna, variations sur le moucharabieh
Le motif du moucharabieh est chez elle une obsession qu’elle retravaille sous diverses formes : la sculpture, la photographie et le dessin. Elle le doit à sa naissance et à sa petite enfance égyptiennes mais le tamis auquel elle a soumis ce canevas géométrique de la grille a été ensuite on ne peut plus international. Susan Hefuna (née en 1962) a en effet grandi et étudié en Allemagne, habité à New York, exposé à Sidney, Doha ou Vancouver. Les lignes et les points qu’elle dessine peuvent accueillir lettres et chiffres, se transformer, lorsqu’elle travaille en trois dimensions, en vitrines, boîtes ou en paravents qui ressemblent à des écrans impeccablement pixellisés. Quand elle dessine, le principe qui la guide dans la création de cette structure rigide est, paradoxalement, la spontanéité maximale. Le prix de dessin de la Fondation Guerlain lui a été attribué en 2013.
LIVRES
Croquis de traverse
Déambuler sans être contraint par le temps, se laisser voguer au gré des rencontres et des hasards, voilà une attitude qui n’est plus tellement de notre temps. C’est celle qu’a adoptée Michel Longuet dans sa quête sur les traces de personnages cultes comme Méliès, Beckett ou Calder. Armé de son érudition, de son carnet et de sa plume, il cherche le 13, rue Laffitte, où Gauguin travaillait pour une charge de bourse, le portail de l’atelier de Toulouse-Lautrec rue Frochot, ou la maison de Jean Follain dans Saint-Lô bombardée. Le résultat est un cahier illustré qui se lit comme une traque esthétique, entremêlant dessins, notes et propos recueillis, dans une logique de l’insolite et du merveilleux. Ainsi, pour pister Méliès l’auteur doit-il approcher une vieille fabrique de bonbons de Montreuil tandis que le « chemin » Albert Marquet l’amène à entrer en contact avec les propriétaires des appartements où vécut le peintre, découvrant au passage qu’ils étaient systématiquement au cinquième étage.
• Adresses fantômes, par Michel Longuet, Grasset, 2013, 112 p., 18,50 €.
