ArtAujourdhui.Hebdo
N° 316 - du 26 septembre 2013 au 2 octobre 2013
Sebastião Salgado, Iceberg entre l’île Paulet et les îles Shetland du sud dans la mer de Weddell. Péninsule Antarctique, 2005 © Sebastião Salgado (exposition à la Maison européenne de la photographie, Paris).
L'AIR DU TEMPS
Le monde selon Salgado
PARIS – L’objectif peut être désintéressé mais c’est néanmoins le résultat d’une ambitieuse logistique que cette rétrospective du photographe brésilien, qui se fit connaître en 1986 par son reportage sur les chercheurs d’or de la Serra Pelada en Amazonie, dans une ambiance aussi folle que celle du Klondyke un siècle plus tôt. Obsédé par la beauté fragile de la nature et par les avanies que nous lui infligeons, Salgado s’est astreint à un grand tour : huit ans à sillonner le globe pour en rapporter des images primordiales. Le seul intitulé résume le propos : avec Genesis, c’est à la recherche des matins du monde que l’on assiste, du Pantanal au pôle Sud en passant par les déserts d’Afrique et le Grand Canyon. Avec une question en filigrane, répétée en autant de lieux (nombreux) que l’exposition est présentée : peut-on encore sauver cette petite planète ?
• Sebastiaõ Salgado, Genesis à la Maison européenne de la photographie, du 25 septembre 2013 au 5 janvier 2014.
EXPOSITIONS
Braque, le boss
PARIS – Plus de quarante ans qu’on l’attendait. Celui que Jean Paulhan surnommait « le patron » n’attirera certainement pas autant de monde que Monet mais cette rétrospective complète rend un juste hommage à celui qui fonda le cubisme avec Picasso. Sa carrière ne s’est d’ailleurs pas bornée à ce coup d’éclat sur le rivage de l’Estaque. Comme le rappelle l’exposition, Braque fut aussi un fauve, un maître du papier collé, du paysage et de la nature morte, tout en collectionnant sur sa longue carrière (plus d’un demi-siècle jusqu’à sa mort en 1963), les amitiés essentielles (Picasso, Kahnweiler, Giacometti, Maeght, Malraux, pour n’en citer qu’une poignée).
• Georges Braque au Grand Palais, du 18 septembre 2013 au 6 janvier 2014.
L’homme mis à poil
PARIS – Cette accumulation de nus héroïques ou fragiles est une présentation légèrement modifiée de celle qui eut un délicieux parfum de scandale à Vienne à l’automne dernier. On se souvient que les footballeurs nus de Pierre & Gilles causèrent une petite bronca et que le Leopold Museum, surfant sur cette notoriété, organisa même une visite en soirée pour les naturistes. Pierre & Gilles sont l’épine dorsale de cette longue exposition, apparaissant à toutes ses étapes, entre David, Bouguereau, Bazille pour les anciens, Mapplethorpe et James Bidgood (avec sa vidéo Pink Narcissus qui clôt le parcours) pour les modernes. A côté de classiques «sérieux», comme le Jeune Homme assis au bord de la mer de Flandrin, on a plaisir à voir quelques rafraîchissantes kitscheries, dont celles d’Alfred Courmes. L’exposition peut évidemment se lire comme un abrégé d’histoire, montrant comment l’imagerie gay, choquante dans l’entre-deux-guerres (Paul Cadmus et son couple dans la salle de bains), a été peu à peu tolérée puis acceptée.
• Masculin/Masculin, l’homme nu dans l’art de 1800 à nos jours au musée d’Orsay, du 24 septembre 2013 au 2 février 2014.
Ces expositions ouvrent aussi…
L'appel de la Sibérie
FLORENCE - Comment Malévitch, Gontcharova et Filonov ont-ils subi l’influence du Grand Est ? Comment ont-ils rendu dans leur œuvre la fascination pour les espaces infinis de l’Orient ? C’est le propos de l’exposition du Palazzo Strozzi, L’avanguardia russa, la Siberia e l’Oriente (photo Ilya Machkov, Portrait de femme dans un fauteuil, huile sur toile, 1913, musée d'Ekaterinbourg). Du 27 septembre 2013 au 19 janvier 2014.
… et de l'Australie
LONDRES – L’Australie, colonie pénitentiaire, comme la Nouvelle-Calédonie ou Cayenne, terre légendaire des antipodes, mais aussi nation nouvelle, pleine d’énergie et d’espace : deux siècles d’art retranscrivent cette symphonie dans Australia à la Royal Academy of Arts. Du 21 septembre au 8 décembre 2013.
Enigmes étrusques
PARIS – Le mystère des Etrusques, de leur langue, de leur civilisation raffinée et « féministe » n’a pas fini d’exciter les spécialistes et le grand public. Le musée Maillol présente une belle sélection de leur esthétique – sculpture funéraire, orfèvrerie, casques et coupes. Du 18 septembre 2013 au 9 février 2014.
LIVRES
Le souffle florentin
La grande exposition que le Louvre consacre à la première moitié du XVe siècle à Florence (du 26 septembre au 6 janvier), déjà montrée au Palazzo Strozzi au printemps 2013, permet de voir à Paris des pièces majeures qui ne voyagent jamais. Voici le relief fondateur de Ghiberti pour le Baptistère (le Sarifice d’Isaac), les Hommes et Femmes illustres d’Andrea del Castagno, le buste en terre cuite de Nicolò da Uzzano (par), les colossaux Saint Louis de Toulouse et Tête de cheval ou la délicate Madone Pazzi (par Donatello) ou cette éclatante Vierge à l’Enfant de Brunelleschi, récemment identifiée à Fiesole. Le catalogue est une somme sur cet art difficile à montrer, la sculpture, et sur son importance fondamentale au début de la Renaissance, lorsqu’il s’agit de revivifier le legs de l’Antiquité et de célébrer la beauté de l’homme. On y est initié à des thématiques très « pointues », des spiritelli (figures d’enfants) aux monuments équestres, du rôle des orphelinats à l’émergence du mécénat privé, une pratique qui nous est restée familière…
• Le printemps de la Renaissance, la sculpture et les arts à Florence, 1400-1460, sous la direction de Marc Bormand et Beatrice Paolozzi Strozzi, Officina Libraria/musée du Louvre éditions, 2013, 552 p., 45 €.
L'ARTISTE DE LA SEMAINE
Les villes rêvées de Farah Atassi
De loin, on dirait un canevas pour faire du crochet, un tamis de chercheur d’or, un nuage de points, un papier peint kitsch, voire une moustiquaire… Plus on s’approche plus apparaissent des motifs compréhensibles, maisons à toit pointu, immeubles, gratte-ciels, qui sont comme de minuscules puces sur un gigantesque quadrillage. Le tour de force de Farah Atassi (née en 1981), est de coder notre environnement urbain et de nous le faire découvrir comme s’il s’agissait d’un message secret. La ville y est un maillage étroit qui garde une vraie poésie décorative. L’artiste est d’origine syrienne, peut-être marquée par la tradition d’une abstraction calligraphique, et l’on ne peut s’empêcher de voir dans ces fragiles maillages une réflexion sur le destin malheureux des millénaires Alep ou Damas.
• Farah Atassi est exposée à la galerie Xippas (108 rue Vieille du Temple, 75003 Paris), du 7 septembre au 26 octobre 2013.
LES VERNISSAGES DE LA SEMAINE
BRÈVES
CHRISTCHURCH (Nouvelle-Zélande) – Scape 7, biennale d’art contemporain, se tient du 27 septembre au 29 novembre 2013.
FONTAINEBLEAU – La Halle de Fontainebleau, ouvrage pionnier en béton construit entre 1936 et 1941 par l’ingénieur Nicolas Esquillan, a été démolie le 23 septembre 2013.
NEVERS – Le musée de la Faïence rouvre ses portes le 28 septembre 2013 après une campagne de restauration de près de dix ans.
PARIS – Le Palais Galliera-musée de la Mode rouvre le 28 septembre 2013. L’exposition inaugurale est consacrée à Azzedine Alaïa.