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N° 337 - du 6 mars 2014 au 12 mars 2014


Les joueurs d’échecs de Lewis, fin du XIIe siècle, Uig, Lewis, Ecosse, ivoire de morse. © The Trustees of the British Museum.

L'AIR DU TEMPS

Les Vikings sont de retour

On les voit comme des pillards, comme des envahisseurs brutaux venus brûler Notre-Dame de Paris, et que l'on ne put calmer qu'en leur faisant don de la Normandie. On leur concède quelques sagas mal dégrossies mais certainement pas le bénéfice d'une véritable civilisation matérielle. Le British Museum rouvre le dossier des Vikings. La conclusion ne change pas fondamentalement : les Vikings étaient des guerriers doublés de marins d'exception (on verra les restes du plus grand bateau viking, découvert en 1997 à Roskilde au Danemark) qui imposèrent rapines et exactions par la force. Le culte des armes - leurs épées décorées - en porte témoignage. Mais ils furent aussi, ce que l'on sait moins, les pionniers d'une civilisation globale. Les trésors récemment mis au jour (comme, en 2007, celui de Vale of York, en Angleterre) montrent l'extraordinaire diversité géographique de leur prédation : certains bijoux et pièces monnaies proviennent de Russie, d'Afghanistan et même d'Ouzbékistan. Autant dire qu'ils furent, après les Grecs et les Romains, les concepteurs d'une "civilisation globale" dans laquelle nous vivons aujourd'hui…
Vikings, life and legend au British Museum, du 6 mars au 22 juin 2014.

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EXPOSITIONS


Pontormo, Visitation, vers 1528-1529, huile sur panneau, 202x156 cm. Carmignano, Pieve di San Michele Arcangelo

Duel Pontormo-Rosso

FLORENCE – Qu’est-ce que la maniera ? Un jeu virtuose d’élongation des formes, de perspectives bizarres, de motifs tirés de l’ésotérisme, des couleurs « électriques ». Né en Italie au moment où s’épuise l’élan de la Renaissance, le maniérisme se développera dans toute l’Europe, avec quelques foyers brillants, par exemple dans la Prague de Rodolphe II. Généralement considéré comme « décadent », il n’a pas toujours bonne presse. Cette exposition est remarquable en ce qu’elle réunit deux de ses principaux exposants italiens : Pontormo (1494-1557) fit toute sa carrière à Florence, passant par les ateliers de Léonard de Vinci et d’Andrea del Sarto. Rosso Fiorentino (1494-1540) incarne en revanche la tendance « internationaliste » : il fera fortune à la cour de François Ier à Fontainebleau. Exactement contemporains, les deux artistes sont mis en regard avec des œuvres venues parfois de loin (Städel Museum de Francfort, Walters Art Museum de Baltimore, National Gallery de Washington). Des tableaux rarement vus, issus de collections privés (comme le Portrait de gentilhomme au livre de Pontormo) ou de musées moins connus (comme la superbe Mort de Cléopâtre de Rosso, prêtée par le Kunstmuseum de Brauschweig), rendent encore plus complète la confrontation.
Pontormo e Rosso Fiorentino, divergenti vie della maniera au Palazzo Strozzi du 8 mars au 30 juillet 2014

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Vincent van Gogh (1853-1890), Portrait de l'artiste au chevalet, Paris, décembre 1887-février 1888. Huile sur toile. H. 65,1 ; L. 50 cm. Amsterdam, Van Gogh Museum (Fondation Vincent van Gogh) © Amsterdam, Van Gogh Museum (Fondation Vincent van Gogh)

Antonin Artaud ausculte Van Gogh

PARIS – Van Gogh était-il un désaxé ? Ou était-ce plutôt la société qui l’était ? Cette exposition de dimensions contenues, mais originale, s’inspire d’un écrit étonnant de 1947. Pierre Loeb, le galeriste de Balthus et Giacometti, avait demandé à Antonin Artaud de visiter la rétrospective Van Gogh ouverte à l’Orangerie. Artaud s’y rendit le 2 février 1947 pour vérifier les dires de la revue Arts, qui voyait dans le peintre hollandais un « déséquilibré avec des excitations violentes à nature maniaque ». Au cœur de l’hiver, pendant trois semaines, Artaud produisit son Van Gogh, le suicidé de la société, qui fut distingué l’année suivante par le prix Sainte-Beuve. Il y développe une thèse originale : Van Gogh, comme ceux que l’on qualifie de « fous », était d’une lucidité supérieure et c’est la société, empêtrée dans ses conventions et apeurée par les vérités dérangeantes, qui choisit de l’ostraciser et de le pousser au suicide. La thèse est ici étayée par une sélection d’œuvres de Van Gogh et de sa correspondance, face aux dessins d’Artaud.
• A lire : Catherine Bouthors-Paillart, Antonin Artaud, l’énonciation ou l’épreuve de la cruauté, Droz, 1997
Van Gogh/Artaud. Le suicidé de la société au musée d’Orsay, du 11 mars au 6 juillet 2014.

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Chez Juba II

MARSEILLE – Volubilis est l’une des plus belles cités antiques d’Afrique du Nord. Au temps de sa splendeur, sous le roi Juba II, au début du Ier siècle, elle était la capitale de la province romaine et Tingitane et le siège d’une société riche et cultivée. Ces bronzes d’hommes et d’animaux, considérés comme trésors nationaux au Maroc, en portent témoignage.
Volubilis. Bronzes antiques du Maroc au MuCEM, du 11 mars au 25 août 2014.

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Il y a 200 ans, Joséphine…

PARIS – Répudiée par Napoléon mais pas par les Français : Joséphine, deux siècles après sa mort (en mai 1814 au château de Malmaison), reste une grande figure de l’histoire de France. A partir d’objets divers (habits, tableaux, mobilier, documents de mariage), l’exposition la fait revivre dans son quotidien de mondaine, d’impératrice, d’amante des arts, des voyages et des fleurs.
Joséphine au Musée du Luxembourg, du 12 mars au 29 juin 2014.

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La Suède cosy de Carl Larsson

PARIS – Si ses reproductions ornent tous les foyers suédois, Carl Larsson (1853-1919) est demeuré méconnu hors de la Scandinavie. Quelque 120 œuvres – évocations de la vie quotidienne et des intérieurs rustiques du Grand Nord – vont donner l’occasion de se familiariser avec cet artiste à la ligne très graphique.
Carl Larsson, l’imagier de la Suède au Petit Palais, du 7 mars au 7 juin 2014.

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VENTES


François-Louis Schmied (1873-1941), Le Vanneur, 1936, détrempe sur papier marouflé sur isorel. Signé, situé et daté en bas à gauche FL Schmied Safi 1936, 111 x 140,5 cm. Estimation : 60 000 à 80 000 €.

L'Art déco selon Marcilhac

PARIS - C'est avec les Vallois, l'un des papes de la redécouverte de l'Art déco. Félix Marcilhac, installé rue Bonaparte, se défait de sa collection personnelle. Parmi les 316 lots, qui vont appâter le gratin international, se trouvent des pièces de grands noms : une commode à l'anglaise de Jean Dunand et Jean Goulden (estimée 300 000 €), un spectaculaire fauteuil nautile de Paul Iribe (150 000 €), un cabinet de Jean-Michel Frank, à panneaux de gypse patinés (lot 63, 400 000 €). Tous les secteurs des arts décoratifs sont représentés, des tapis au verre (avec, notamment, Marcel Marinot) et la vente devrait confirmer ou faire émerger de nouvelles valeurs (Gustave Miklos, Joseph Csaky, François-Louis Schmied, Ernest Boiceau, le peintre hollandais Leonard Sarluis). Dans cet univers de prix inaccessibles, quelques pièces restent raisonnables : des cadres de Rose Adler ou Jacques Adnet, des dessins d'Etienne Beothy, un tabouret d'André Arbus, chacune à moins de 10 000 €. Au début des années 1970, avant le boom de l'Art déco, on aurait pu obtenir la plupart des chefs-d'œuvre pour ce prix !
Félix Marcilhac, collection privée, le 12 mars 2014 chez Sotheby's (en association avec Artcurial)

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LIVRES

Emilio Terry à la lettre

En notre époque de dépendance chronique à l'image, voici un ouvrage curieux : il présente l'œuvre du décorateur Emilio Terry (1890-1969), l'une des stars de l'après-guerre, sans une seule illustration, hormis les têtes de chapitre, des aquarelles commandées à Laurent de Commines. La faute à un conflit avec les ayants droit, qui ont refusé toute reproduction (les dessins de Terry ont pourtant été légués aux Arts décoratifs)… Autant dire qu'il faut s'armer d'un esprit d'abstraction (et d'une connexion internet, par exemple pour voir la maquette de la maison-colimaçon) pour pénétrer cet univers. Le propos reste très prenant tant Terry a incarné une génération d'architectes-décorateurs d'une immense culture et d'un cosmopolitisme à toute épreuve. Sa famille, originaire du comté de Cork, en Irlande, a fait fortune à Cuba dans l'industrie du sucre (le père de Terry sera propriétaire du château de Chenonceau pendant vingt ans), et tous les rejetons se marieront à la noblesse européenne (les de Castellane, Lucigny-Faucinge, etc.). Les chapitres explorent les grands chantiers d'Emilio Terry, tous tardifs (il a alors dépassé la cinquantaine) : l'hôtel particulier de Niarchos à Paris, le château de Groussay pour Charles de Beistegui ou la villa Loste au pays Basque. Au fond, cette évocation peut très bien se passer d'images : c'est celle d'une grandeur évanouie, inspirée du XVIIIe siècle français, une forme de nostalgie…
Emilio Terry, architecte et décorateur, par Pierre Arizzoli-Clémentel, Gourcuff-Gradenigo, 304 p., 69 €.

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LES VERNISSAGES DE LA SEMAINE