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N° 361 - du 16 octobre 2014 au 22 octobre 2014


Gustave Courbet (1819-1877) Le Sommeil, 1866 Huile sur toile, 135 × 200 cm Paris, Petit Palais, musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris © RMN-Grand Palais / Hervé Lewandowski (exposition au musée d'Orsay)

L'AIR DU TEMPS

La leçon de Sade

PARIS – Son nom est entré dans tous les foyers, grâce au catalogue - réel ou imaginaire - de ses turpitudes sexuelles. Mais l’influence du marquis de Sade (1740-1814) va au-delà de ses exploits libertins. Farouchement opposé aux pouvoirs établis (la religion, la noblesse, l’armée), il exalte la liberté individuelle - du corps mais aussi de l’esprit - face au devoir et aux conventions, et est prêt à sacrifier sa liberté à ses idées (il passera 27 ans en prison, comme… Nelson Mandela). Encyclopédiste des Lumières, il anticipe l’anarchisme et les courants libertaires. Comment mesurer son influence à travers l’art, la peinture et le cinéma ? C’est le défi du musée d’Orsay, qui met en avant, avec les symbolistes (Moreau, Redon), les surréalistes (Dalí, Masson), et une série d’artistes sulfureux et maudits (Pierre Molinier), le goût assumé pour l’excès, l’athéisme, la perversion, la folie et, évidemment, la luxure sans bornes. Assurément de nouvelles frontières dont Sade est l'explorateur pionnier…
Sade, attaquer le soleil au musée d’Orsay, du 14 octobre 2014 au 25 janvier 2015.

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L'OBJET DE LA SEMAINE


Le manuscrit des 120 Journées de Sodome © Musée des Lettres et Manuscrits.

Sade au bout du rouleau

En septembre 1795, pendant vingt soirées, dans le silence de la Bastille où il est emprisonné, Sade recopie d’une écriture microscopique ce qui deviendra son œuvre la plus célèbre, les 120 Journées de Sodome ou l’Ecole du libertinage. Collant bout à bout les bandes de papier, il obtient un rouleau de 12 mètres de long qu’il cache dans un étui, derrière une pierre du mur. Lorsqu’il est transféré à l’asile de Charenton, quelques jours avant le 14 juillet 1789, il ne peut emporter le manuscrit, qu’il croira définitivement perdu. Comme la plupart de ses commentateurs… jusqu’à ce qu’il réapparaisse en Allemagne au début du XXe siècle où son propriétaire, le dermatologue-sexologue Iwan Bloch, en donne une première transcription. Le destin du rouleau est aussi rocambolesque que la vie du divin marquis. Acheté par le vicomte Charles de Noailles en 1929 (sa femme, Marie-Laure, était une descendante de Sade), il est prêté en 1982, pour analyse, à l’éditeur Jean Grouet, ancien secrétaire de Françoise Sagan, qui le vend frauduleusement à un collectionneur suisse, Gérard Nordmann. Il faudra trente ans de procès et de médiations pour aboutir à une issue : le rouleau est racheté au printemps 2014 par le musée des Lettres et Manuscrits pour la bagatelle de 7 millions d’euros, indemnisation des Noailles comprise…
• Le rouleau, partiellement déroulé, est au centre de l’exposition Sade, marquis de l’ombre, prince des Lumières au musée des Lettres et Manuscrits, jusqu’au 18 janvier 2015.

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EXPOSITIONS


Rembrandt, Titus à sa table, 1655, huile sur toile, 77 x 63 cm. Museum Boijmans Van Beuningen, Rotterdam © Museum Boijmans Van Beuningen, Rotterdam. Photo: Studio Tromp, Rotterdam.

Rembrandt, le chant du cygne

LONDRES – C’est la victoire des vieux contre le jeunisme ! Après Turner à la Tate Britain (depuis le 10 septembre), voici venir Rembrandt à la National Gallery. Non pas sous l’avatar d’un jeune maître triomphant mais sous celui d’un vieux maître, malade et solitaire (en 1660, à 60 ans, il a perdu toutes ses femmes et tous ses enfants), qui sait pourtant se réinventer pour produire la peinture la plus révolutionnaire de son temps. Plus de trois siècles plus tard, elle continue d’être une source d’étonnement et d’inspiration par son introspection sans fard, son jeu des lumières et des matières, sa réinterprétation de motifs canoniques.
Rembrandt: The Late Works à la National Gallery, du 15 octobre 2014 au 18 janvier 2015.

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• Selon le Wall Street Journal, le Rembrandt Research Project s’apprête à réattribuer à Rembrandt 70 toiles précédemment retirées de son corpus.

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Rembrandt, L'opération à la tête, vers 1624/25, huile sur toile, 21,6 x 17,8 cm. The Leiden Collection, New York © The Leiden Collection, New York.

Emotions hollandaises

LEYDE – La mort de Lucrèce, le Christ couronné d’épines, une opération à la tête sans anesthésie ? Ou Vénus et Cupidon folâtrant, Loth reluquant ses filles, des bergers s’adonnant au doux jeu de l’amour ? L’exposition explore comment les maîtres hollandais ont rendu les deux facettes antagonistes de l’existence - souffrance et jouissance.
Emotion, douleur et plaisir dans la peinture hollandaise du Siècle d’or au Frans Hals Museum, du 11 octobre 2014 au 15 janvier 2015.

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Griffon, bronze, XIe-XIIe siècle, 107x87x43 cm. Museo dell'Opera del Duomo, Pise.

Maroc, les siècles d’or

PARIS – L’Islam extrémiste n’a pas bonne presse, autant rappeler qu’il y a toujours eu en parallèle un Islam raffiné - et souvent plus tolérant que le christianisme des mêmes époques… Le Louvre propose une plongée dans les siècles glorieux du Maroc (XI-XVe siècle), lorsque les dynasties almoravide puis almohade régnèrent en Andalousie, et lorsque Séville et Fès la mérinide étaient les villes les plus avancées du monde. Minbars, manuscrits (dont un exemplaire du philosophe juif Maïmonide), céramique, éléments d’architecture racontent une ère de prospérité, de recherche intellectuelle et d'échanges (d'Almería à Bamako) - une facette moins connue d’Al-Andalus.
Maroc médiéval. Un empire de l'Afrique à l'Espagne au musée du Louvre du 17 octobre 2014 au 19 janvier 2014.

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Images de 14-18

PARIS – Comment les artistes ont-ils réagi face à l’horreur et à la démesure du premier conflit mondial ? Images de propagande, photos de reportage, expérimentations des futuristes, portraits de douleur : en cette année de mémoire, voici l’une des réunions les plus complètes avec 400 œuvres, de Vallotton à Roger de La Fresnaye, en passant par Georges-Victor Hugo et Otto Dix.
Vu du front, représenter la Grande Guerre au musée de l’Armée, du 15 octobre 2014 au 25 janvier 2015.

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VENTES


Lot n° 16. Nage, Lily, Roscoff, 1933, tirage argentique, cachet du photographe et numéro du négatif à l'encre bleue au verso image 24 x 14,7 cm papier 24 x 18,2 cm. Estimation : 1200-1500 €.

Steiner, l’amour fou

PARIS – Il fait partie de cette extraordinaire diaspora hongroise qui marqua la photographie à Paris dans l’entre-deux-guerres. André Steiner (1901-1978) n’a jamais accédé à la célébrité de Robert Capa, Kertész ou Brassaï mais il fut un membre actif du courant de la Nouvelle Vision. Expérimentateur comme put l’être Man Ray (avec ses solarisations, photogrammes et surimpressions), il est surtout connu pour avoir documenté de façon obsessive l’amour qui le lia à sa femme. Celle-ci, Lily, une championne de natation du cercle juif Hakoah de Vienne (le film Watermarks, de Yaron Zilberman, retrace le destin tragique de cette équipe), fut le modèle exclusif de ses nus et de ses portraits. Intimes ou, au contraire, d’une esthétique martiale (tendance convergente des communistes et des fascistes de l’époque), ils marquent le court apogée de Steiner. Après la séparation avec sa femme et son engagement dans la Résistance, il disparut du milieu de la photographie. Près de 200 images, estimées entre 500 et 5000 €, décrivent son itinéraire.
André Steiner le 21 octobre 2014 à Drouot-Richelieu (Binoche & Giquello)

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LIVRES

La peinture émasculée

«No Sex Please, We’re Artists » : on pourrait paraphraser le titre d’une célèbre comédie anglaise pour signifier l’interdit qui a pesé pendant des siècles sur la représentation en peinture et sculpture des attributs sexuels. La restitution sans fard de l’Origine du monde par Courbet en 1866 est un coup de tonnerre isolé : au milieu du XXe siècle encore, son propriétaire, Jacques Lacan, fait dessiner un tableau-paravent pour le cacher au regard (cette œuvre de Masson est à l’exposition du musée d’Orsay) et il ne sera présenté pour la première fois au public qu’en 1988… Les auteurs mènent une enquête plaisante sur les stratégies de dissimulation, qui doivent beaucoup à la religion chrétienne : le Sauveur est muni d’un perizonium dès les premiers siècles alors que les condamnés étaient crucifiés nus… De la feuille de figuier de la Genèse (qui devient en Europe feuille de vigne), jusqu’au pagne, les écrans sont d’une incroyable diversité : une branche de cactus pour Abel, un fourreau d’épée pour Mars ou Bélisaire, sa chevelure pour Vénus ou son gourdin pour Hercule. Mais aussi des étoffes, des grains de raisin, des plumes, des pétales, même des papillons ! Avec un effet « pervers » : ces obstacles ont parfois tendance à attirer le regard là où il ne doit pas se poser…
Cache-sexe, le désaveu du sexe dans l’art, par Sylvie Aubenas et Philippe Comar, La Martinière, 2014, 240 p., 52 €.

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EN BREF

LONDRES – La foire d’art moderne et contemporain Frieze se tient du 15 au 18 octobre 2014 à Regent’s Park.

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PARIS – Pierre Bergé, ancien compagnon d’Yves Saint Laurent, a annoncé la mise en vente de sa bibliothèque personnelle - manuscrits et livres du XVe au XXe siècle - en sept ventes thématiques, à partir de décembre 2015.

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PARIS - Le salon Réalités nouvelles, fondé en 1946 et consacré à l'art abstrait, se tient du 19 au 26 octobre 2014 au Parc floral.

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LES VERNISSAGES DE LA SEMAINE