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N° 424 - du 24 mars 2016 au 30 mars 2016


Braïtou-Sala, Portrait d’Éléna Olmazu, 1931, tempera sur toile, 162 x 114 cm. Collection particulière. Photographie : Alain Leprince

L'AIR DU TEMPS

Braïtou-Sala, la tragédie d’un peintre mondain

Son parcours a tout d’un conte de fée. Issu d’une modeste famille juive de La Goulette à Tunis (son père était épicier), arrivé à Paris à une date qui prête encore à discussion (les biographes hésitent entre 1901, 1909 et 1911), Albert Braïtou-Sala (1885-1972) s’impose dans les années vingt comme l’un des grands peintres mondains du tout-Paris. Sans prétendre à faire œuvre de psychologue, il immortalise dans leurs plus beaux atours les people du moment. Voici le héros de l’aviation Paul-Louis Weiller avec sa sublime épouse grecque, Aliki Diplarakos, première Héllène à être sacrée miss Europe, voici Elena Olmazu, brillante sportive et femme d’affaires de Bucarest, avec son vertigineux décolleté, voici la cantatrice Marthe Chenal, voici le fier baronet britannique William Garthwaite… Comme Tamara de Lempicka, Braïtou-Sala symbolise et incarne à merveille l’esthétique Art déco et son cortège cosmopolite. Elle est devenue une icône, lui a été oublié. Tout comme une bonne partie de sa famille a été gommée de l’histoire, dissoute dans les camps d’extermination. Il côtoya certains de ceux qui contribuèrent à l'entreprise de destruction, réalisant par exemple un portrait de Pétain en 1927. Dans des décors vert profond, gris bleuté et mauve de Parme, le musée de la Piscine fait œuvre de mémoire, montrant cette époque si légère, pétillante, insouciante qui, pour beaucoup, ne fut que l’antichambre de l’enfer.
Braïtou-Sala, l’élégance d’un monde en péril à La Piscine, du 19 mars au 5 juin 2016.

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EXPOSITIONS


George Desvallières, La Grèce (Childe Harold), 1910, huile sur toile, 143 x 158 cm. Collection particulière. Photo © Suzanne Nagy. George Desvallières © Adagp, Paris 2016/droits réservés

Desvallières, la route de la foi

PARIS – Comment expliquer une telle désaffection ? Alors que les noms de ses contemporains Jacques-Emile Blanche et Etienne Dinet, voire Ranson et Anquetin, sont encore connus des amateurs d’art, celui de George Desvallières (1861-1950) a quasiment sombré. Cet artiste d’une grande longévité a pourtant de beaux trophées à son actif. Il fut l’un des animateurs du Salon d’automne qui devait consacrer les fauves en 1905. Auteur de grandes compositions mythologiques, de nus antiques dans une palette agressive, il chroniqua la vie des quartiers populaires à Paris ou Londres. On lui doit aussi de grandes fresques pour palais aristocratiques, églises et mémoriaux comme celui de l’ossuaire de Douaumont. C’est donc un personnage à multiples facettes que le Petit Palais remet au goût du jour avec quelque 90 œuvres couvrant toute sa carrière. Sa désaffection doit sans doute à son christianisme pictural voisin de ceux de Rouault et Maurice Denis : dans la seconde moitié de sa carrière, il ne peint que des scènes religieuses, centrées sur la Passion et la vie de la Vierge.
George Desvallières, la peinture corps et âme au Petit Palais, du 15 mars au 17 juillet 2016.

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Albert Marquet, Vue du Port de Havre (Le Quai de notre Dame), vers 1911, huile sur toile, 65 x 81 cm © Fondation Collection E.G. Bührle, Zurich.

Marquet, le goût du port

PARIS – Il fut un compagnon de Matisse, partageant le même maître, Gustave Moreau, et des amitiés comme celles de Manguin et Camoin. Mais Albert Marquet (1875-1947), s’il a participé à la révolution fauve de 1905, a eu une carrière bien plus discrète, préférant le long et répétitif travail sur quelques motifs de prédilection : la Seine, les bords de mer et, surtout, les ports et leur ambiance. De Naples assoupi en passant par Rotterdam, élégie industrielle, jusqu’à Alger, sanctuaire de la flotte libre pendant la Seconde Guerre mondiale, il s’en est fait un catalogue personnel qui rejoint celui de Signac. La rétrospective n’oublie pas de montrer d’autres facettes de sa production, les études de personnages, les nus et, encore plus séduisants, les esquisses dessinées qui le firent surnommer « le Hokusai français » par Matisse.
Albert Marquet, peintre du temps suspendu au musée d’Art moderne de la Ville de Paris, du 25 mars au 21 août 2016.

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ET EN ITALIE...


Umberto Boccioni, Dynamisme d'un corps humain, 1913 huile sur toile, 100 x 100 cm. Museo del Novecento, Milan.

Boccioni, 100 ans

MILAN – Sa carrière a été tronquée par la guerre, comme celle de Franz Marc ou d’Henri Gaudier-Brzeska. Avec une mort stupide, fruit d’une chute à cheval, à Vérone, alors qu’il servait dans le corps des cyclistes… Cependant, en 34 ans (1882-1916), Umberto Boccioni a eu le temps de laisser sa marque dans l’histoire du XXe siècle, en étant l’un des fondateurs du futurisme. Les riches collections milanaises, notamment les 60 dessins du Castello Sforzesco, qui servent de fil rouge, sont réunies pour la première fois. Mais les grandes institutions mondiales, du Getty au musée d’Osaka, de la fondation Barilla au musée de Lugano, sont mises à contribution pour une rétrospective ambitieuse de 260 œuvres, dont quelques-uns de ses chefs-d’œuvre comme Elasticité (1912) ou Dynamisme d’un corps humain.
Boccioni, genio e memoria au Palazzo Reale, du 23 mars au 10 juillet 2016.

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Scoop sur Severini

PARME – Il a lié son nom au futurisme mais pas seulement. L’exposition à la Fondation Magnani Rocca, belle demeure patricienne des environs de Parme, montre le parcours bien plus complexe de Gino Severini (1883-1966), qui passa des expériences cubistes aux livres d’artiste, des grandes décorations murales au néo-pointillisme. Vingt-cinq œuvres récemment attribuées ou redécouvertes constituent un des points forts de l’exposition. Du 19 mars au 3 juillet.

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Macchiaioli, éloge de la tache

ROME – Leur nom dérive de « macchia », tache en italien. Ils sont dans la péninsule les alter ego des impressionnistes. Le Chiostro del Bramante réunit 110 œuvres des Macchiaioli, dont Fattori, Signorini et De Nittis, en évoquant neuf collectionneurs du passé qui les défendirent. Du 16 mars au 4 septembre 2016.

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MUSÉES


Emile Bernard, Etude pour le blé noir, huile sur toile, 1888, 24x19 cm, Musée de Pont-Aven.

Pont-Aven voit plus grand

PONT-AVEN – Le nom de cette petite ville bretonne est connu dans le monde entier comme l’un des hauts lieux de la peinture moderne, et notamment comme un sanctuaire nabi. Pourtant, il fallut attendre 1953 pour y voir une première exposition importante consacrée à Gauguin et 1985 pour l’ouverture d’un musée. Entièrement repensé par l’Atelier de l’Ile, celui-ci occupe désormais un lieu historique, l’annexe de l’hôtel Julia, où logeaient les artistes les plus aisés, ainsi que d’une extension, qui lui permet de loger sa collection grandissante. Comptant de nombreux dépôts (notamment du musée d’Orsay et du musée des Beaux-Arts de Quimper), elle comprend évidemment des Gauguin (peu nombreux car inaccessibles), des Sérusier, Maurice Denis, Emile Bernard, Vallotton. Et une série de peintres dont les noms se sont largement effacés des mémoires : Claude-Emile Schuffenecker, Henry Mosler, Anselmo Bucci, Jean Deyrolle, Maxime Maufra ou Armand Seguin (1869-1903), mort trop tôt et qui n’a guère laissé plus d’une quinzaine de tableaux. L’exposition inaugurale sur la famille Rouart est moins inédite : elle en est à sa quatrième étape après Nancy, Yerres et Rueil-Malmaison.
• Le musée de Pont-Aven rouvre au public le 26 mars 2016.

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LIVRES

Alexandre Séon, reflets d’un âge d’or

Originaire de Chazelles dans la Loire, qui lui dédia une rue, Alexandre Séon (1855-1917) a lié son nom à Puvis de Chavannes, son soutien indéfectible, et au Sâr Péladan, l’animateur de la confrérie des Rose-Croix. Mystique et symboliste, l’oublié Séon a réalisé quelques grandes compositions comme celle de la salle des mariages de la mairie de Courbevoie (toujours visible). Mais celui qui emportait toujours dans la poche une reproduction de la Joconde a surtout brillé dans une série de scènes arcadiennes. Des nymphes cueillent des fleurs dans des sous-bois veloutés, des beautés idéales habitent des décors de roches roses et de flots turquoise, qui lui furent en partie inspirés par ses séjours à l’île de Bréhat. La Fée Mélusine, Orphée, Jeanne d’Arc, sirènes et muses furent les compagnons d’une vie pourtant sombre, marquée par plusieurs échecs (décorations pour l’hôtel de ville de Paris, illustrations de l’Evangile pour l’éditeur Mame) et par la consternation devant la folie meurtrière des hommes, qui accéléra sa fin, d’une maladie d’estomac en pleine guerre.
Alexandre Séon, la beauté idéale, Silvana Editoriale, 2015, 288 p., 35 €.

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Desvallières XXL

Alors que le rythme de l’édition s’accélère – publication et obsolescence devenant des phénomènes quasi contemporains – les catalogues raisonnés semblent nous rappeler des vertus de patience d’un autre âge. Celui-ci a demandé une vingtaine d’années de recherche, sous la direction de la petite-fille de l’artiste. Les chiffres sont évidemment impressionnants : 49 pages de bibliographie, 30 pages d’index d’œuvres, 2675 numéros recensés dont quelque 600 tableaux, une centaine de pastels, 1600 dessins, 320 illustrations et 40 vitraux. Pour chaque œuvre, la technique, la provenance et l’historique des expositions sont décortiqués, autant que l’enquête l’a permis. Une longue carrière de 80 ans est ainsi offerte en vision panoramique, du Prussien et le concierge, un dessin sur papier ligné d’écolier de 1870 (l’auteur avait 9 ans), à Notre-Dame des Neiges, une huile sur toile peinte en 1950, à la veille de sa mort, pour une petite chapelle à Guebwiller, dans les Vosges, tout près de l’endroit où son propre fils avait disparu au combat dans la Première Guerre mondiale.
George Desvallières, catalogue raisonné de l’œuvre complet sous la direction de Catherine Ambroselli de Bayser, Somogy, 2016, 3 vol., 1048 p., 380 €.

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