Aby Warburg, ou la tentation du regard
Marie-Anne Lescourret
Il n’est pas rare que les rejetons de grandes familles de banquiers se prennent de passion pour la musique ou l’art. Il est beaucoup plus rare que les autres membres de la famille leur apportent un soutien indéfectible pendant des décennies. C’est ce qui semble le plus extraordinaire dans la biographie d’Aby Warburg (1866-1929), fondateur d’un courant d’histoire de l’art fondé sur une étude documentaire impitoyable et sur un croisement systématique des sources. Dans un parcours qui fait le grand écart entre l’Allemagne, Florence (il y travaille à une thèse sur Botticelli) et l’Arizona, marqué par plusieurs internements psychiatriques, Warburg poursuit son projet de constituer une bibliothèque majeure d’histoire de l’art. La KBW, inaugurée en 1926 à Hambourg, où sa famille a fait fortune dans la navigation et la banque, sera opportunément transférée à Londres à la montée du nazisme, et y reste aujourd’hui une référence fondamentale. La biographie, qui manie une importante documentation, tente de cerner une personnalité riche et complexe, en la replaçant dans le réseau de ses contemporains (Cassirer, Berenson, Saxl).
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Critique parue dans la newsletter N° 354 - du 3 juillet 2014 au 9 juillet 2014