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N° 327 - du 12 décembre 2013 au 18 décembre 2013


Fondation Pierre Arnaud Photo Federico Berardi, 2013 (Lens, Valais, Suisse)

L'AIR DU TEMPS

De nouveaux musées en Europe

La reconversion d’un hôtel cinq étoiles à Paris ? Elle peut allègrement dépasser les 200 millions d’euros – quelques exemples récents le prouvent. La rénovation d’un musée de province ? On peut s’en tirer avec une fraction de ce prix (quelque 23,5 millions d'euros pour Valence et à peine 800 000 euros pour le musée des Beaux-Arts de Bordeaux). Qui a dit que la culture coûtait cher ? En décembre, au moment où le rythme des nouvelles expositions décroît pour la trêve de Noël, les musées prennent la relève. Alors que le Louvre Lens a fêté le 4 décembre son premier anniversaire sur une bonne note (900 000 visiteurs et le prix de l'Equerre d'argent au meilleur bâtiment de l'année), cinq établissements nouveaux - ou soumis à une restauration complète - ouvrent leurs portes en un mois à peine. Art ancien ou Art nouveau, à la ville ou à la campagne, il y a là de quoi remplir le programme des vacances si la neige n’est pas au rendez-vous… ou si l’on veut échapper aux crises de foie. L’art se digère bien.

MUSÉES


Eugène Delacroix, La Grèce sur les ruines de Missolonghi, 1826, huile sur toile, 213x142 cm. Achat de la ville en 1852 © Musée des Beaux-Arts, DGAC, Bordeaux

Bordeaux pouponne son Delacroix

BORDEAUX - Les musées de province ont bien du mal à attirer l’attention, accaparée par les mastodontes parisiens et il faut souvent une occasion particulière – comme, ici, la réouverture au public des collections des XIXe st XXe siècles - pour se rendre compte de la richesse de certains fonds régionaux. Le musée des Beaux-arts de Bordeaux fut l’un de ceux qui bénéficièrent des envois du Louvre en région, décidés par le décret Chaptal de 1802. Arrivèrent ainsi un Titien (Tarquin et Lucrèce), un Rubens, un Pierre de Cortone… La fidélité de Bordeaux aux Bourbons, la générosité de collectionneurs locaux lui valurent ensuite d’autres collections significatives (Lacaze, Lodi Martin Duffour Dubergier, etc). Une visite permet de découvrir le nombre inattendu d’artistes « locaux » : Domergue, mais surtout Redon, Marquet, Lhote, Dupas. Même Delacroix qui n’en était pas originaire, voyait Bordeaux comme une sorte de « ville natale ». L’un de ses chefs-d’œuvre, La Grèce sur les ruines de Missolonghi, y est de nouveau visible. On attend maintenant la programmation des expositions temporaires pour voir si l’institution pourra s’imposer comme but de pèlerinage durable…
• Le musée des Beaux-Arts de Bordeaux rouvre le 19 décembre 2013.

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Bruxelles, ode fin de siècle

BRUXELLES – Son slogan (uniquement en anglais, « Every end is a beginning ») sent un peu trop le jus de crâne marketing… Il entend synthétiser une vérité : combien les esthétiques de la fin du XIXe siècle ont marqué l’art belge. Elles en constituent l’un des grands moments, avec une impressionnante concentration de talents, incluant les peintres symbolistes Khnopff et Spilliaert, l’inclassable Ensor, mais aussi les écrivains Maeterlinck et Verhaeren, les génies de l’Art nouveau Horta et Van de Velde. La mue de l’ancien musée d’Art moderne se poursuit, quatre ans après l’ouverture du musée Magritte.
• Le Musée Fin-de-Siècle Museum a ouvert le 6 décembre 2013.

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Carlo Fornara (1871-1968), Le vent d’Aquilon, 1902-1904, huile sur toile, 135 x 154 cm. Collection privée

La fondation Arnaud, un écrin pour la peinture XIXe

LENS (Suisse) – Le Valais, son lac, ses cimes, ses vins. Et ses musées… Après la fondation Gianadda, la fondation Pierre Arnaud, tout près de Crans-Montana, promet d’être une nouvelle attraction locale. Cette saine concurrence est un hommage à un entrepreneur français (1922-1996), né à Marseille, actif dans la Résistance, installé au Maroc puis tombé amoureux de la région, où il créa Fotolabo, une entreprise florissante avant l’arrivée de la photographie numérique. Avec son beau parallélépipède de verre posé au bord du lac du Louché (conçu par l’architecte Jean-Pierre Emery), la fondation rend hommage au collectionneur et à sa passion, la peinture du tournant du XXe siècle. Un cycle de cinq expositions en cinq ans débute avec le divisionnisme : Seurat et Signac, bien sûr, mais tout autant les peintres issus des Alpes comme Segantini, Giacometti père ou Cuno Amiet. Un second cycle, estival, explorera les rapports entre les arts d’Occident et d’ailleurs.
• La fondation Pierre Arnaud ouvre le 22 décembre 2013. Exposition inaugurale Couleur maîtrisée ? couleur éclatée ?, du 22 décembre 2013 au 22 avril 2014.

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Tate Britain, South East Quadrant Gallery © Helene Binet

Tate Britain, retour aux fondamentaux

LONDRES – L’institution fondée par l’inventeur du sucre en morceaux, Henry Tate (1819-1899), est devenue une véritable galaxie, juxtaposant la Tate Modern, la Tate Liverpool, la Tate St Ives et, noyau original, la Tate Britain, posée au bord de la Tamise. Cette dernière vient enfin de voir réhabilitée son entrée d’apparat et s’est dotée d’un nouvel espace de communication, un vertigineux escalier en colimaçon dessiné par Caruso St John. Depuis mai, le musée a aussi procédé à une nouvelle présentation des collections, selon le principe le plus simple, la chronologie. Cela permet des rapprochements inattendus, opposant par exemple deux facettes de la peinture victorienne – solaire et mythologique chez Alma-Tadema, sombre et ancrée dans son époque chez Walter Sickert.
• La Tate Britain a achevé sa rénovation le 19 novembre 2013.

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Belvédère et tour Saint-Apollinaire

Valence, de la préhistoire à Alechinsky

VALENCE – Chaque musée de province a un point fort. A Valence, dans l’ancien palais épiscopal (où il était installé depuis 1911 et auquel Jean-Paul Philippon et son équipe viennent d’adjoindre un bâtiment moderne), c’est Hubert Robert. Les collections consacrées au « peintre des ruines » sont les plus riches au monde, avec celles du Louvre et de l’Ermitage, et concluent donc logiquement le parcours. Robert n’était pas enfant du pays mais le collectionneur Julien Victor Veyrenc, qui légua ses tableaux en 1836, était de la proche Marsanne. Le musée possède aussi, parmi ses 20 000 pièces, un important fonds consacré aux premières traces d’occupation humaine (400 000 ans av. J.-C.) et à l’Antiquité, quand Valence était la Valentia romaine, nœud vital de communication, un petit cabinet d’histoire naturelle, des toiles ou dessins de Panini, Corot, Boudin, Dufy, Wols ou Alechinsky. Une véritable esthétique de la mixité…
• Le Musée de Valence rouvre le 14 décembre 2013.

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LIVRES

Barceló vu de loin

Mettre en perspective : c’est un exercice difficile et les monographies d’artistes contemporains pèchent souvent par leur fragilité en la matière. Rien de tel ici. Pour nous initier à Miquel Barceló, l’auteur invoque aussi bien le savant médiéval Raymond Lulle et l’ethnologue Marcel Griaule que Strindberg, Byron, Dante, voire Blaise Cendrars : cette écrivain chevronnée (elle est née en 1928) eut l’occasion de connaître à New York le grand bourlingueur. Autant dire que le livre est autant une étude sur l’insaisissable artiste catalan que le manifeste d’une certaine critique d’art. Les fondamentaux y sont – la première exposition vue par Barceló à Paris à l’âge de 17 ans (« Jean Paulhan à travers ses peintres »), la chapelle de la cathédrale de Palma, les céramiques animales, les dessins « dogons », les tableaux débordants de matière. Mais celle qui fut l’amie de Clement Greenberg et de Mark Rothko sait envelopper ces repères chronologiques dans un impressionnant réseau d’influences et de parallèles : même les rétifs à http://www.fondationpierrearnaud.ch Barceló trouveront leur bonheur dans ce voyage érudit et transversal…
Miquel Barceló, en chemin, par Dore Ashton, Actes Sud, 2013, 35 €, 250 p.

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