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N° 363 - du 30 octobre 2014 au 5 novembre 2014


Musée Polin de l'Histoire des juifs polonais, Varsovie. Photo Wojciech Kryoski.

L'AIR DU TEMPS

Lettre de Varsovie : une mémoire juive

Environ 3,3 millions en 1939, peut-être 15 000 personnes aujourd’hui : la population juive de Pologne a prodigieusement décru et la Shoah en est évidemment responsable. S’il existait déjà un musée de l’insurrection de Varsovie, il manquait une vision d’ensemble de la présence juive, qui a marqué dix siècles du pays, depuis les premières mentions autour de l’an Mil (selon la légende, les juifs persécutés en Allemagne auraient trouvé refuge dans cette forêt mythique de Polin, où les écorces des arbres portaient des versets du Talmud), jusqu’à la dernière vague de départ en 1967-68. C’est chose faite avec ce musée de verre, symboliquement fracturé en son milieu, dû aux architectes finlandais Lahdelma & Mahlamäki. Avec quelques objets (tableaux, pièces liturgiques, et même tickets de rationnement) mais se fondant surtout sur des évocations (photos, films, maquettes) et des restitutions (d'une rue typique ou de la synagogue de Gwozdiec avec ses superbes peintures murales), il parcourt une histoire d’une extrême richesse. Celle-ci voit se succéder âges d’or (sous Casimir le Grand, au XIVe siècle, par exemple) et persécutions (en 1946, encore, les habitants de Kielce accusèrent les juifs de meurtre rituel sur un enfant chrétien). La profusion des informations peut désorienter mais répond au souhait des concepteurs : si l’on savait comment étaient morts les juifs de Pologne, on savait beaucoup moins comment ils avaient vécu. Ou comment renouer partiellement les fils de la mémoire…
• Le musée Polin de l’Histoire des juifs polonais a été inauguré le 28 octobre 2014.

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A VOIR AUSSI EN POLOGNE


Sainte Anne, IXe siècle, peinture a tempera sur plâtre.

Merveilles de Nubie

VARSOVIE - A la veille du chantier pharaonique du barrage d’Assouan, des fouilles de sauvegarde sont lancées le long du Nil. Les archéologues polonais, qui travaillent au Soudan, au sud de la première cataracte, sous la conduite de Kazimierz Michalowski (1901-1981), mettent au jour à Faras une cathédrale construite au VIIe siècle, et sans cesse enrichie jusqu’au XIVe siècle. Grâce à un accord avec le gouvernement soudanais, la moitié des trouvailles sont destinées au Musée national de Varsovie. Textiles, stèles, chapiteaux sculptés mais surtout une soixantaine de fresques (la Sainte Famille, des archanges et des saints) constituent le plus beau fonds d’art nubien en Europe. Il a été entièrement remis en scène dans une nouvelle muséographie, qui incorpore d’autres pièces, provenant notamment des royaumes chrétiens d’Ethiopie.
• La galerie Faras au Musée national, a rouvert au public le 13 octobre 2014.

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Olga Boznanska, La Jeune fille aux chrysanthèmes, huile sur toile, Musée national de Cracovie (restauré avec l’appui de la Fondation Paribas).

Boznanska, Polonaise de Paris

CRACOVIE – C’est l’une des artistes modernistes les plus réputées du pays. Née en 1865 à Cracovie de mère française, formée en partie à Munich, Olga Boznanska s’installe à Paris à la fin du XIXe siècle. Elle y deviendra une portraitiste recherchée, jusqu’à sa mort en 1940. Réunissant plus de 170 de ses tableaux (le Musée national de Cracovie reçut en don le contenu de son atelier parisien), les confrontant aux œuvres de quelques-uns de ses contemporains, l’exposition dessine, à coup de portraits légers et vaporeux – peintres et écrivains, mondains et élégantes - l’instantané de la société raffinée de la Belle Epoque.
Olga Boznanska au Musée national de Cracovie, du 25 octobre 2014 au 1er février 2015.

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EXPOSITIONS : GROS PLAN SUR LA GUERRE DE 14-18

Souvenirs des Van Eyck

BERLIN – C’est l’œuvre la plus célèbre des frères Van Eyck, qui subit actuellement une restauration minutieuse au musée de Gand. Le polyptyque de l’Agneau mystique n’est donc ici présent que par procuration, reconstitué à partir de copies des XVIe et XVIIe siècles et de photographies. Une façon de rappeler qu’il fut autrefois propriété du musée, et qu’il ne fut restitué à la Belgique qu'en 1920, dans le cadre des réparations de guerre.
The Ghent Altarpiece par les frères Van Eyck à la Gemaldegälerie, du 4 septembre 2014 au 29 mars 2015.

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Ressentir la guerre

BERLIN – Impossible de rester indifférent devant la guerre. Mais comment l'éprouve-t-on dans sa chair à des époques différentes ? C’est le thème qui sous-tend l’exposition, qui rassemble des souvenirs de la Première Guerre mondiale et des créations d’artistes contemporains comme Gunther Uecker.
Feeling War au musée des Cultures européennes, du 27 juin 2014 au 28 juin 2015

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Cent ans de recul

PARIS – Parler de la Grande Guerre un siècle après son déroulement ? Le défi n’effraie pas les photographes contemporains, qui ont, pour évoquer cet événement révolu, diverses « stratégies ». Ceux-ci (Bréson) scrutent dans le paysage les traces de la conflagration - certaines sont encore parfaitement visibles. Ceux-là (Bard) explorent les cimetières et les vitraux des églises, y découvrant le fil ténu des vies fauchées. D’autres, enfin (Ventura ou Fleisher avec son installation de portraits de disparus flottant dans un bain révélateur), estimant que la fiction peut être aussi parlante que la réalité, reconstituent des scènes, évoquent des ambiances. Autant de manières de fixer une mémoire, altérée mais aussi nourrie par le passage du temps.
Mémoire traversée, paysage, visage de la Grande Guerre à Eléphant Paname, du 31 octobre 2014 au 18 janvier 2015.

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L’Italie d'avant

ROME – A quoi ressemblait l’art qui se développait en Italie à la veille du premier conflit mondial ? En 1905, Boccioni et Severini organisent un salon des refusés, qui prend le contre-pied de l’art académique et entend absorber les influences des avant-gardes allemandes. A la déclaration de guerre (en 1915), les futuristes s’engagent avec passion, tandis que d’autres comme De Chirico ou Carrà fourbissent leurs armes pour élaborer un art du silence et du désenchantement.
Secessione e Avanguardia à la GNAM, du 31 octobre 2014 au 15 février 2015.

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Soldats en alerte sur une altana, tirage à la gélatine, 1915-1918. Fondazione Musei Civici di Venezia.

Venise sur ses gardes

VENISE – En 1915, un an après ses alliés, l’Italie entre en guerre contre l’Allemagne. Venise, proche du front autrichien, se fortifie. En 350 documents d’époque (photos et timbres), ces chantiers destinés à protéger les hommes, mais aussi le patrimoine de la Sérénissime, nous sont restitués. Exercices militaires sur les traditionnelles terrasses en bois (altane), empilements de sacs de sable devant les basiliques, déménagement de la statue de Colleoni (par Verrocchio) ou des fresques du Tintoret à la Scuola Grande di San Rocco : des efforts justifiés par le pilonnage du début de l’année 1918 - dont 300 bombes dans la seule nuit du 27 au 28 février.
Venezia si difende à la Casa dei Tre Oci, du 13 septembre au 8 décembre 2014.

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VENTES


Lot 63 - Jean-Michel Frank et Adolphe Chanaux, paire de guéridons ronds en fer noirci. Exécutés en France vers 1935. H. 64 cm; D. 51 cm. Provenance : Carlos Maria Alvear, Palais Sans-Souci de Buenos Aires. Estimation : 20 000-30 000 €.

Art déco : la route de Buenos Aires

HYÈRES - Les Noailles ne quittent décidément pas l’affiche, même si ce n’est que par ricochet… Après l’affaire du rouleau des 120 Journées de Sade (qui leur appartint et qui est actuellement montré au musée des Lettres et Manuscrits), alors qu’a lieu la belle rétrospective Baccarat au Petit Palais (leur appartement de la place des Etats-Unis, relooké par Starck, est le showroom de la marque), c’est leur villa d’Hyères (dessinée par Mallet-Stevens) qui va occuper le devant de la scène. Elle a été choisie comme décor pour une vente d’Art déco avec un argument qui fait mouche : ces pièces de mobilier auraient pu la meubler en son temps, au tournant des années vingt et trente lorsque les habitués s’appelaient Man Ray et Buñuel, Cocteau et Lifar… Au menu, des pièces signées Dupré-Lafon ou André Groult, des luminaires de Perzel ou Boris Lacroix, des reliefs des jumeaux Martel. Le stock le plus spectaculaire provient de Buenos Aires, de l’ancienne collection Lectoure, et surtout du Palais Sans-Souci, édifié en 1916 par l’architecte René Sargent à la demande de la famille Alvear. Propriété des aristocrates italiens Durini depuis un demi-siècle, il livre aujourd’hui quelques pépites de Jean-Michel Frank - guéridons en laiton, tables en galuchat… Juste retour : une partie des bénéfices seront dévolus à la villa Noailles pour financer ses acquisitions et ses activités.
Art déco à la villa Noailles (vente organisée par la SVV Damien Leclère, Marseille), le 5 novembre 2014.

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LIVRES

Portrait de l’étranger

En période de crise, « l’Autre » est généralement accusé de tous les maux. Mais comment le définir ? Cet ouvrage, qui accompagnait un cycle de conférences données au Louvre en septembre et octobre 2014, montre comment se sont façonnées dans l’art occidental des derniers siècles les grandes figures-repoussoirs que sont celles du Noir, du Juif, du Musulman et du Bohémien. Etudiant leur représentation chez Bosch, Caravage ou Rubens, l’auteur (qui s’y connaît en altérité, étant né à Bucarest, formé à Rome et Paris, et enseignant à Fribourg) en décortique les ressorts. Traits physiques, signes distinctifs, modes de représentation sont peu à peu codifiés par les peintres. Ainsi, le Juif est-il caractérisé par l’habit jaune (que porte Judas dans les fresques de Giotto à la chapelle Scrovegni de Padoue), puis par la rouelle, et, autant que possible, par une représentation de profil, pour insister sur son nez crochu, son front fuyant, ses cheveux roux. Il en va de même pour le Mahométan avec son turban ou pour le Tsigane avec ses cartes truquées : les clichés qui ont nourri la propagande xénophobe remontent parfois loin…
L’image de l’Autre. Noirs, Juifs, Musulmans et « Gitans » dans l’art occidental des Temps modernes, par Victor Stoichita, Hazan, 2014, 280 p., 25 €.

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EN BREF

GENÈVE - Le nouveau Musée d'ethnographie ouvre au public le 31 octobre 2014.

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PARIS - Julien Prévieux est le lauréat 2014 du prix d'art contemporain Marcel Duchamp.

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PARIS – La 65e édition de l’exposition d’art contemporain Jeune Création se tient au 104, du 30 octobre au 2 novembre 2014.

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