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N° 452 - du 1 décembre 2016 au 7 décembre 2016


Artemisia Gentileschi, Yaël et Siséra, 1620, huile sur toile, 86x125 cm, musée des Beaux-Arts, Budapest.

L'AIR DU TEMPS

Artemisia, la Frida Kahlo du XVIIe siècle

ROME - Rares sont les femmes peintres du passé à avoir atteint la renommée de leurs collègues masculins. Louise Moillon, Clara Peeters (actuellement présentée au Prado), Rosalba Carriera, Elisabeth Vigée-Lebrun en sont quelques-unes, à des degrés divers. Effet d’un film à succès et d’une vie romanesque, c’est Artemisia Gentileschi (1593-1652) qui s’est récemment affirmé comme étoile de première grandeur dans ce club de « happy few ». Auréolée d’une image de féministe avant l’heure (elle fait condamner son violeur, le peintre Agostino Tassi, malgré le sexisme du tribunal), elle secondera habilement son père Orazio. Mais elle mènera vite une existence indépendante et voyageuse, travaillant à Rome, sa ville natale, mais aussi à Florence et Naples (où elle mourra), développant un « caravagisme » personnel, souvent centré sur des héroïnes antiques. L’exposition la suit dans ces trois capitales, où elle produira l’essentiel de son art, vigoureux, plein de clair-obscur et de couleurs rutilantes, avant son 40e anniversaire. Elle est entourée de quelques stars de l’époque comme Allori, Vouet, Ribera et ce peintre dont le nom est une poésie, Antiveduto Grammatica (que l’on pourrait traduire approximativement par « Prévu Grammaire »), qui fut brièvement maître de Caravage.
Artemisa au Palazzo Braschi, du 30 novembre 2016 au 7 mai 2017.

EXPOSITIONS


Cy Twombly, Coronation of Sesostris, 2000, Part V : Acrylic, wax crayon and lead pencil on canvas, 206,1 x 156,5 cm. Pinault Collection © Pinault Collection / Photo Robert Mc Keever.

Twombly, éloge du gribouillis

PARIS - Roland Barthes était l’un de ses grands admirateurs, appréciant sa « main en lévitation », sa « paresse » qui lui permettait « d’éviter la platitude des codes graphiques ». Le travail de Cy Twombly, tout en signes, brossés ou effacés comme sur des palimpsestes, écritures généralement indéchiffrables, ratures rageuses et coulures de couleurs, est désormais adoubé par le marché et les musées comme une œuvre majeure du XXe siècle. Pour certains, il en émane une poésie, une spiritualité, un mystère, qui se goûtent comme une émotion profonde, se passant assez bien d’explications. Pour d’autres, il ne s’agit que d’une incompréhensible divinisation du gribouillis. Le Centre Pompidou, avec cette rétrospective de 140 œuvres, donne les éléments pour affiner les positions. Il fait aussi découvrir un pan moins connu du natif de Lexington (1928-2011), devenu grand bourgeois italien par son mariage avec une héritière Franchetti : la sculpture. Ces objets trouvés, assemblés, soclés sur des bouts de palettes et recouverts d’une modeste peinture blanche, sont idéalement mis en scène contre la grande baie vitrée, avec le Sacré-Cœur en toile de fond. Si Twombly était assurément d’une grande culture, fin connaisseur du passé (il était venu en Europe, attiré par Lascaux), on peut difficilement suivre le commissaire lorsqu’il le présente - notamment avec sa série sur l’empereur Commode - comme un rénovateur de la peinture d’histoire. Au contraire, l’hermétisme reste, tout au long de sa carrière, l’un des caractères fondamentaux de Twombly. Chez lui, comme dans les antiques religions à mystères, il est essentiel de ne pas tout comprendre…
Cy Twombly au Centre Pompidou, du 30 novembre 2016 au 30 avril 2017.

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ELLES OUVRENT AUSSI CETTE SEMAINE

Morellet et ses amis

CHAMBÉRY - Le minimaliste disparu au printemps dernier à 90 ans est célébré avec ses amis (dont Max Bill et Elsworth Kelly). On lèvera les yeux sur la façade pour y dénicher une de ses œuvres, Le Fantôme de Malevitch, qui y est installée depuis deux ans. Au musée des Beaux-Arts, du 3 décembre 2016 au mars 2017.

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Miroirs

LENS - Il était indispensable à Lewis Carroll et aux frères Grimm (pour Blanche-Neige) mais il a aussi beaucoup servi aux artistes pour agrandir l’espace ou s’adonner à des jeux de reflet et d’identité. C’est le miroir, entré dans notre langue il y a huit siècles. L’originalité de l’exposition : la trentaine d’œuvres exposées proviennent toutes des collections de la nouvelle région, les Hauts-de-France. Au Louvre Lens, du 3 décembre 2016 au 18 septembre 2017

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Matisse, le laboratoire intérieur

LYON - Dans le cadre des célébrations du 40e anniversaire du Centre Pompidou, cette exposition réunit 300 dessins du maître de l’art moderne, depuis les premières académies d’un élève tardif jusqu’aux grands dessins au pinceau de la décennies 1950. Les organisateurs en profitent pour rappeler que Matisse gagna presque 15 ans de vie (il décéda en 1954) grâce à une opération « miraculeuse » au foie, en 1941, à la clinique du Parc, à Lyon. Au musée des Beaux-Arts, du 2 décembre 2016 au 6 mars 2017.

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Maestro Mateo

MADRID - Certains de ses collègues n’ont pas eu la chance de voir passer leur nom à l’histoire. Lui a juste réussi à léguer cette appellation : « Maître Mathieu ». Il aurait pourtant droit à la reconnaissance universelle en tant que plus grand sculpteur de l’art roman espagnol, notamment des statues de la cathédrale de Saint-Jacques de Compostelle et de son fameux portique de la Gloire. Quatorze de ces pièces, dont certaines fraîchement restaurées, sont présentées. Au musée du Prado, du 29 novembre 2016 au 26 mars 2017.

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Présumées coupables

PARIS - Elles furent sorcières, empoisonneuses, avorteuses, pétroleuses ou vendues aux Allemands, bref, coupables. Il ne fallait pas bon être suspecté de tels forfaits par la rumeur publique : le lynchage n’était pas qu’une spécialité américaine… L’exposition est basée sur le dépouillement d’une matière énorme : 320 interrogatoires au long de six siècles. Aux Archives nationales, du 30 novembre 2016 au 27 mars 2017.

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Fêtes et divertissements à la Cour

VERSAILLES - Ne sent-on pas dans l’air comme un désir nostalgique de royauté, d’Ancien Régime, de valeurs traditionnelles ? L’exposition ravira les tenants du « C’était mieux avant » : elle évoque les coûteuses machineries du Roi Soleil pour apprivoiser ses courtisans en mettant en scène une fête perpétuelle. Au Château de Versailles, du 29 novembre 2016 au 26 mars 2017.

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VENTES


Lot 75 : Nef Rothschild, attribuée à Georg Pfründt (vers 1603-1663), Allemagne du Sud, XVIIe siècle, ivoire, 38,2x31,7cm.

Ces rhinocéros qu’on sculpte…

LONDRES - La provenance de cet objet exceptionnel nous replonge dans le XVIIe siècle et sa passion pour les cabinets de curiosités. On y raffolait de chefs-d’œuvre de la nature ou de la virtuosité humaine. Celui-ci combine les deux : une matière première exotique (ivoire) et le travail d’un sculpteur émérite de Franconie, Georg Pfründt (1603-1663), qui fut quelque temps actif à Paris. Cette coupe ciselée nous rappelle aussi une tout autre période et un autre milieu : la jet set mondaine de l’après-guerre. Elle orna en effet l’une des plus belles demeures de Paris, l’hôtel Lambert sur l’île Saint-Louis. C’était du temps où des fêtes mémorables s’y donnaient, comme le bal des Têtes (en 1956), où l’on pouvait croiser Zizi Jeanmaire et le jeune Yves Saint Laurent en décorateur débutant, ou le Bal oriental (1969). L’animateur des lieux était le baron Alexis de Redé (1922-2004), personnalité polymorphe qui y avait été installé par son amant, le milliardaire chilien Arturo López-Willshaw. Lorsque les Rothschild (Guy et Marie-Hélène) rachetèrent l’hôtel, ils continuèrent d’y héberger leur ami. Ils vendirent même en commun une partie de leurs collections, en mai 1975 à Monaco : c’est alors que l’objet fut acquis par un propriétaire improbable, le fonds de pension des chemins de fer britanniques… Alors que les souvenirs des bals costumés et soirées surréalistes de l’hôtel Lambert (désormais possédé par les émirs qataris) s’effacent inexorablement, la coupe véhicule encore le parfum de cette époque d’étincelantes mondanités…
Old Master Sculpture and Works of Art chez Sotheby’s Londres, le 6 décembre 2016.

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LIVRES

Zoom sur Michel-Ange

Le sous-titre occupe une ligne mais est explicite : « Tout Michel-Ange ou presque en un seul texte et en 1000 images ». Fort de ses contacts rapprochés avec les chefs-d’œuvre du héros terrible (il a notamment eu le privilège de monter sur une nacelle pour voir de près le plafond de la chapelle Sixtine), l’auteur nous les restitue dans le détail. Ne se privant pas de lui trouver des faiblesses (par exemple dans les drapés du tondo Doni), il voit fondamentalement dans Michel-Ange un sculpteur, même quand il est peintre. Ce qui impose de pouvoir tourner autour des statues, de décortiquer muscles, tendons et torsions impensables des anatomies… On apprend enfin les ressorts du « chiasme » (le fameux déhanché) et l’on observe d’éloquents gros plans, comme les dents à l’intérieur de la bouche de son Bacchus de 1496 - comment donc Michel-Ange est-il parvenu à les sculpter ? Ce parcours de visite se présente comme une BD. Mais il est tout autant un guide de voyage, confirmant que Michel-Ange est un continent.
Michel-Ange par Hector Obalk, Hazan, 96 p., 25 €.

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EN BREF

MIAMI - La foire Art Basel Miami a lieu du 1er au 4 décembre 2016.

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PARIS - Le revolver de Verlaine, estimé 50 000 €, a été adjugé 360 000 € le 30 novembre 2016 (voir notre lettre de la semaine dernière).

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LES VERNISSAGES DE LA SEMAINE


POL PIERART

3 décembre 2016 - PARIS - Galerie Bernard Bouche

Un artiste obsédé par le rapprochement entre la peinture et les mots

Tous les vernissages de la semaine