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Expositions

Les petites femmes de Van Dongen

La fondation Gianadda dresse le parcours du plus célèbre peintre néerlandais du 20e siècle.


Daniel Marchesseau
© Fondation Gianadda
En réunissant des toiles méconnues et quelques pièces maîtresses, prêtées par les plus grands musées, la Fondation Gianadda dresse, une fois encore, un bilan intelligent de l'œuvre d'un grand acteur de la modernité. «Le visage importe peu. Ce qui l'intéresse, c'est la beauté des chairs» : en inaugurant l'exposition dont il est le commissaire, Daniel Marchesseau n'a eu de cesse, samedi dernier, de souligner la sensualité du peintre hollandais Van Dongen. «Il aura autant libéré la peinture qu'il aura libéré la femme», a insisté le spécialiste, à propos de celui qui, de son installation à Paris, en 1899, à sa mort à Monte-Carlo, en 1968, a portraituré sa compagne, puis des prostituées et finalement des mondaines.


Van Dongen, nu et femme
Chronologique, l'exposition définit l'évolution du style du maître, post-impressionniste, puis assez fauve et enfin relativement réaliste. Les couleurs sont éclatantes, le trait, talentueux, la touche, virevoltante, la simplification des formes et l'épaisseur de la matière efficaces. Les toiles les plus réussies, peintes au début des années dix, doivent leur vigueur à des séjours en Espagne, au Maroc et en Égypte. L'orientalisme mis à la mode par le grand Matisse convient alors, admirablement, au souci décoratif de Van Dongen. «Il aime l'effet et ne s'embarasse jamais de la nuance».

Les 95 œuvres présentées séduisent, indéniablement. Elles irritent, aussi, tant il est sensible que le peintre frôle, régulièrement, le grand art. Toutes ces chairs offertes, toutes ces moues désabusées, tous ces accessoires fétichistes, toutes ces poses languissantes auraient pu constituer le témoignage historique des «années cocktail», propres à la bourgeoisie occidentale. Oui, mais il y a tous ces membres dont on a l'impression qu'ils sont dépourvus de squelettes, ces bras aux allures d'anses de tasses ; tous ces portraits de commande, peu inspirés ; toutes ces fourrures et ces pierres précieuses mal portées par des modèles avec lesquels, à l'évidence, l'artiste ne communie pas... Si le pinceau de van Dongen était assurément capable de tout, il a visiblement, trop souvent, manqué de s'émerveiller.


 Françoise Monnin
29.01.2002