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Patrimoine

Le plus beau cadeau pour le patrimoine ? Une loterie…

Sur l’exemple de nos voisins anglais, italiens et allemands, la Fondation du Patrimoine milite pour l’instauration d’une loterie du patrimoine.


Manoir du Gué de la Chaîne
La Grande-Bretagne occupe dans ce domaine une position d’avant-garde. La Loterie nationale y a été créée en 1993 et une partie de ses recettes – environ 5% soit près de 3 milliards de francs par an – est destinée au Heritage Lottery Fund. Celui-ci finance des projets décentralisés de sauvegarde du patrimoine. En Italie, c’est près d’un milliard de francs par an qui est consacré à des actions similaires. Enfin, en Allemagne, la Spirale de la Chance ou Glücke Spiral, qui est un jeu dédié, rapporte 130 millions de francs par an. En France, en revanche, rien de similaire. Si l’on compte 8 ou 9 jeux consacrés au sport, aucun n’a pour objet le patrimoine. La Française des Jeux a réalisé en l’an 2000 un chiffre d’affaires de 42,8 milliards de francs. La moitié, environ, revient aux joueurs. Une fois couverts les frais d’exploitation, l’Etat reçoit un peu plus de 13 milliards de francs. L’une des principales affectations de cette somme est le financement du Fonds National de Développement du Sport (soit environ 1,2 milliard de francs par an).


Maison forte de La Motte Vesset
Partant du constat de réussite, à l’étranger, de ce type de financement, la Fondation du Patrimoine, par la voix de son président, Edouard de Royère, et de son directeur général, François de Mazières, souhaite que la France s’engage dans la même direction. «La Fondation du Patrimoine a été créée par la loi du 2 juillet 1996, explique François de Mazières. L’idée était d’en faire une sorte de National Trust à la française, ayant une compétence générale. Le financement aurait dû être fondé sur une technique de levier : chaque fois que la Fondation aurait trouvé 1 franc de financement privé, l’Etat aurait fourni 1 franc de son côté.» Le modèle n’a pas fonctionné, l’Etat n’ayant jamais transféré la ligne budgétaire de 30 à 40 millions de francs annuels, comme il l’avait promis. «Les collectivités locales ont pris le relais, toujours sur le même principe d’un engagement accompagnant celui des entreprises privées. La moitié des régions et des départements ont participé à des actions. Mais il serait bon de revenir à la logique initiale de co-financement par l’Etat.»

Pour cela, la Fondation s’est fait l’avocat d’un loto du patrimoine. Son lobbying est relayé par des organisations aux buts similaires : Vieilles Maisons Françaises, La Demeure Historique, Rempart, etc. «En réalité, l’idée n’est pas de créer un loto du patrimoine mais un tirage spécial de la loterie, comme cela a pu être fait à l’occasion des Jeux Olympiques. Dans l’idéal, il aurait lieu en même temps que les Journées du Patrimoine, en septembre. Les 11 millions de personnes qui fréquentent à cette occasion les musées et les monuments historiques ne jouent généralement pas. Ce faisant, on n’amputerait pas une action de l’Etat, on créerait un nouveau public pour la Française des Jeux et l’on financerait la protection du patrimoine de proximité : au total, près de 500 000 lavoirs, pigeonniers ou maisons de village sont concernés !»


 Rafael Pic
24.12.2001