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Drouot : «la Gazette n’est pas à vendre»

Dans le combat qui se mène pour la prise de contrôle de Drouot SA, la Gazette est un actif essentiel. Le président des commissaires-priseurs, Dominique Ribeyre, exclut sa cession.

Les commissaires-priseurs ont actuellement en main deux offres fermes : celle de Pierre Bergé qui évalue chacune de leur part dans Drouot SA à 610 000 euros - et arrive à échéance aujourd'hui - et celle de Barclays Private Equity, qui lui est supérieure de 50%. Dans «Le Figaro» de vendredi dernier, Dominique Ribeyre, président de la Compagnie des commissaires-priseurs de Paris trouvait «peu généreuse» l’offre Bergé. Qu’en est-il aujourd’hui ? «Je n’ai aucun préjugé contre Pierre Bergé. C’est un homme de caractère, qui sait ce qu’il veut et qui a mené à bien de grands projets. Ce qui explique que certains de mes confrères se soient enthousiasmés pour sa proposition. Mais l’offre de la Barclays a changé la donne, elle a été comme un pavé dans la mare qui a amené beaucoup des commissaires-priseurs à s’interroger. D’autres candidats pourraient se manifester prochainement.» Selon maître Ribeyre, il n’y a pas à ce jour de majorité claire pour l’un ou l’autre des prétendants. Alter, une société d’investissement, qui avait envoyé une lettre d’intention, définie comme «très imprécise», n’y a pas donné suite à ce jour. Quant à la compagnie financière Edmond de Rothschild, également pressentie comme intermédiaire éventuel et que nous avons contactée, elle s’est refusée à tout commentaire.

Un autre candidat, en revanche, s’est manifesté au grand jour. Artprice, filiale du groupe Serveur, spécialisé dans l’information sur le marché de l’art et les ventes aux enchères, a fait une offre pour la partie presse de Drouot SA, le groupe Auctionspress, qui édite la Gazette de l’Hôtel Drouot. «Ce n’est même pas la peine d’en parler, tranche Dominique Ribeyre, Nous ne sommes pas vendeurs de la Gazette. C’est l’une des filiales auxquelles nous sommes le plus attachés. Et ce n’est pas simplement une question d’argent. Tout n’est pas une question d’argent…». Du côté d’Artprice, on avance des arguments précis. «Les annonceurs de province ont leur mot à dire, précise Thierry Ehrmann, son président. La province représente 57% de la facturation et 65 à 70% de la pagination de la Gazette. Il y avait jusqu’à présent des tarifs différenciés, ce que la loi Sapin interdit dans le cadre d’une société commerciale. Si le réflexe perdure de passer par la Gazette, c’est que, dans les années 70 et 80, les commissaires-priseurs parisiens y étaient contraints sous peine de poursuites disciplinaires. Ils n’ont plus cette obligation aujourd’hui. De nombreux commissaires-priseurs – notamment ceux qui ont pris leur indépendance – trouveraient inacceptable que l’on puisse être juge et partie, que la Gazette appartienne à l’une des études de la place, en l’occurrence Drouot.»

Pour Pierre Bergé, qui se présente «porteur d’un projet d’entreprise» en vue de créer une marque, la Gazette constitue un élément important d’actif, a priori indissociable de l'ensemble. Pour le groupe Barclays, qui suit une logique d’investisseur financier, il n’en va pas nécessairement de même. Le rachat de Drouot SA pourrait préluder à une vente par appartements, en vue de maximiser la rentabilité. «Toutes les banques d’affaires sont d’accord pour déclarer que les branches devraient être gérées par des industriels spécialisés, l’immobilier par un spécialiste de l’immobilier, la branche information par un spécialiste de l’information - ce que nous sommes - capable de l’ouvrir sur l’international et sur le numérique…» poursuit Thierry Ehrmann. Le patron d’Artprice ne communique pas le montant de son offre mais affirme qu'elle est matérialisée par un protocole du 23 juillet 2001 et qu’il possède les fonds propres nécessaires, sans avoir à recourir au marché.


 Rafael Pic
31.01.2002