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Politique culturelle

Felicidad Moreno, Sin titulo, 2001


Corinne Mercadier, n°26 (une fois et pas plus), 2000-2001


Altadis, les enfants du tabac

La firme franco-espagnole, dans sa politique de soutien à la création contemporaine, prime de jeunes artistes. Les six lauréats sont exposés à partir d'aujourd'hui chez Durand-Dessert.

La manufacture nationale des tabacs, la Seita, gérait autrefois, dans le cadre de sa politique de mécénat culturel, un musée, rue Surcouf à Paris. On a pu y voir un certain nombre d’expositions marquantes, consacrées à Jawlensky ou au baroque paraguayen. Depuis la fusion de la Seita, en 1999, avec son homologue espagnol Tabacalera pour créer Altadis, cinquième groupe de tabac mondial, la politique de mécénat a changé d’objectif. Il s’agit désormais de favoriser la création contemporaine. Le musée de la rue Surcouf a fermé ses portes tandis qu’étaient créés des prix Altadis pour le cinéma et les arts plastiques.

Les lauréats de la seconde édition sont exposés à partir d’aujourd’hui à la galerie Durand-Dessert. Comment gère-t-on un prix d’arts plastiques à cheval sur les Pyrénées? Deux commissaires ont été désignés, un espagnol, Mariano Navarro, et un français, Emmanuel Fessy, ancien directeur de la rédaction du «Journal des Arts». «On m’a demandé de choisir 15 artistes résidant en France, en portant l’accent sur la sculpture et la peinture. Je me suis imposé une limite : qu’il n’y ait pas d’installation dans les œuvres sélectionnées, une entreprise n’ayant pas vocation à gérer ce type de création. Il fallait par ailleurs respecter un critère de base : que ces artistes n’aient jamais fait l’objet d’une monographie, c’est-à-dire d’un ouvrage comportant un texte d’un critique d’art. C’est en effet un bon critère : dès qu’on lui consacre une monographie, l’artiste change de statut. La recherche a été plus difficile que prévu. J’ai effectué beaucoup de visites d’ateliers mais, en définitive, j’ai trouvé la plupart des artistes chez les galeristes. Ce qui ne m’étonne pas : on parle beaucoup d’une crise de l’art en France mais nous avons beaucoup de marchands, qui font très bien leur travail. Ceux qui représentent les trois lauréats français – les galeries Filles du Calvaire, Bernard Utudjian et Eric Dupond – sont emblématiques d’une nouvelle génération, sérieuse, sans paillettes. »

Le jury, réuni à Madrid, était composé de représentants d’Altadis – en premier lieu les deux présidents, Jean-Dominique Comolli et Pablo Isla – et d’un panel de spécialistes. On y comptait notamment Christian Caujolle, rédacteur en chef de l’agence Vu, Marin Karmitz, les galeristes Michel Durand-Dessert et Juana de Aizpuru, Maria Corral, directrice de la collection d’art contemporain de la fondation La Caixa, les critiques d’art Jean-Luc Chalumeau et Guy Boyer, le commissaire de l’année précédente qui, par statut, en fait partie. Les six artistes lauréats sont les espagnols Felicidad Moreno, Bleda y Rosa, Florentino Díaz et les français Corinne Mercadier, Eric Aupol et Gabrielle Wambaugh. Le prix comprend l’achat d’une œuvre par Altadis, qui sera exposée au siège social, la publication d’une monographie aux éditions Actes Sud, une exposition chez Durand-Dessert à Paris puis chez Juana de Aizpuru à Madrid.


 Rafael Pic
14.03.2002