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Expositions

Brigitte Terziev, violence et raffinement

La Galerie Alain Margaron présente les nouvelles sculptures d'une artiste très secrète.


Dans l'atelier de Brigitte Terziev
© Photo: Françoise Monnin
Depuis qu'elle a obtenu le Prix Bourdelle (en 1998), Brigitte Terziev est reconnue par ses pairs. Elle figure parmi les sculpteurs importants vivant en France. Et cependant, qui connaît cette femme rousse et secrète (née en 1943), qui vécut longtemps dans le monde du théâtre, en Europe de l'Est, avant de revenir à ses premières amours parisiennes ? Au début des années 80, tout ce qu'elle avait retenu des gestes de son père, également sculpteur, et de ses maîtres de l'Ecole nationale supérieure des beaux-arts, Adam et Couturier, a resurgi. Avec le plâtre et avec la terre, elle a alors entrepris de métamorphoser son expérience douloureuse de l'existence en une étrange armée de manchots. «Dès qu'il y a des bras», dit-elle, «ça devient des individus. Plus anecdotiques, moins emblématiques».

«Je suis partie, comme tout le monde, du drame de la comédie humaine». Les œuvres présentées en ce moment sont monumentales, hiératiques, intimidantes. Mêlés au plâtre, des outils métalliques, récupérés dans de vieilles fermes ou sur des ferrailles, hérissent les formes, provoquant un curieux va-et-vient d'interprétations. Guerriers, armés jusqu'aux dents, ou martyrs, conservant dans leur chair cicatrisée les instruments des tortures qui leur ont été infligées ? «Ce sont des samouraïs, mais ils n'exercent jamais. Ils ont leurs blessures, leurs armes, mais ne sont jamais offensifs».

«La vie, c'est une guerre. Il faut faire face, toujours». Les sculptures présentées évoquent les notions de résistance et dialoguent avec la victoire impossible, celle qui s'agit de remporter contre le temps. Pour Brigitte Terziev, vivre, c'est se blesser, se plisser. Pour mieux l'indiquer, elle patine les surfaces, rivette des plaques, accentue des fractures. Et, cependant, chacune de ses œuvres conserve une verticalité troublante. Une dignité. Un courage. Un espoir, qui a fort à voir avec celui que l'on prête à la Victoire de Samothrace, à laquelle on a coupé, il y a plusieurs milliers d'années, la tête, mais pas les ailes.


 Françoise Monnin
07.05.2002