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Patrimoine

Retour des dieux à Bagatelle

On les croyait perdues. Disparues depuis 1872, Cérès, Flore, Clio et autres statues commandées par le comte d’Artois retrouvent leur lieu d’origine.


© Muriel Carbonnet
PARIS. Destinées à orner les niches du Bâtiment des Pages, dix statues furent, selon, toutes vraisemblance, commandées pour le comte d’Artois par l’architecte François-Joseph Bélanger en 1778. Le sculpteur Nicolas-François Lhuillier réalise «à 1000 livres, deux figures de femmes drapées en pierre… placées dans les niches à côté des communs, l’une représentant la Muse de l’Histoire et l’autre une Flore… ». Il est difficile de dire exactement qui a exécuté les huit autres, également en pierre de Conflans et de même dimension (5 pieds et demi), ni leur répartition sur les deux façades du Pavillon. Les deux Sphinx réalisés par le sculpteur Roland étaient placés devant l’entrée du château. Lorsque le Bâtiment des Pages est rasé en 1872, renversant par là même l’axe de la composition architecturale de l’ensemble, les statues «sont reléguées dans le parc ou dans un sous-sol. C’est le début d’une longue absence», explique Julien Lelong, directeur de l’Association des Amis de Bagatelle depuis six ans.

Un retour inespéré
À la fin des années 1980, le couple Salmon-Legagneur et leur sœur, Madame Balleyguier, propriétaires du Château de Bonnemare (à Radepont dans l’Eure) prennent contact avec la Ville de Paris pour obtenir des informations sur un ensemble de statues achetées, selon la tradition familiale, par leur arrière-grand-père, notaire à Paris, en 1904. En 1990, Jean-Jacques Gautier, inspecteur du Mobilier national, les identifie. À la suite d’un prêt de quatre statues pour les besoins de l’exposition «Bagatelle dans ses jardins» organisée en 1997, des pourparlers sont engagés dans la perspective de l’achat par l’Association des Amis de Bagatelle de toutes les pièces. «Les analyses des experts soulignent les étroites similitudes existant entre la statuaire de Bonnemare et celle du Bâtiment des Pages, telle qu’on la trouve décrite dans les inventaires du Comte d’Artois : même pierre (de Conflans), mêmes sujets, mêmes dimensions et même nombre», explique Julien Lelong. Conscient de la valeur historique des statues mais aussi de leur mauvais état, le couple normand se met d’accord avec l’association sur le montant de la vente - 129 582 € - qui se concrétise le 9 septembre 1999 à Bagatelle devant Maître Patrice Bonduelle et Maître Dominique Budry. Restaurées, les statues prodigues sont enfin revenues au bercail.


 Muriel Carbonnet
19.10.2002