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Expositions

César, homme de faire

Après la rétrospective consacrée à Niki de Saint Phalle, Nice rend hommage au plus méridional des nouveaux réalistes.


César, La danseuse, 1949,
fer soudé, 42 x 15 x 8 cm, coll. privée.
© D. R.
NICE. «Je n’ai jamais dit : “Voilà, je n’emploierai plus la main. Tout se fera par la machine”. J’ai beau être fainéant, je n’ai fait que laisser faire à la machine ce que mes mains ne pouvaient faire», disait César dans un entretien avec Bernard Blistène. «Faire» et «fer» sont, dans cette remarquable exposition, les maîtres mots de celui qui se revendiquait sculpteur, non intellectuel, et dompteur du réel grâce à ce matériau qu’il fut le premier à travailler de la sorte. De formation classique par ses études aux Beaux-Arts de Paris et de Marseille, celui que la plupart des critiques ont délaissé, s’est entiché de ce matériau pauvre, pas réellement par choix mais parce qu’il n’avait pas les moyens de s’offrir le marbre ou le bronze. À cela s’ajoute le hasard des rencontres qui le mènent dans le Var, à Trans-en-Provence, dans une menuiserie industrielle en 1949 où il découvre la soudure à l’arc.

La noblesse du fer révélée
César le répète, il est un instinctif et il travaille comme un artisan. Il nous fait oublier la provenance de ces objets récupérés, réhabilite les déchets de la société de consommation et donne au symbole de la civilisation industrielle une noblesse et une esthétique alors insoupçonnées. Il est marseillais, il fait le pitre et son art ne manque jamais d’humour et de paradoxes : que ce soit son bestiaire ou Le guerrier, La Vierge et l’Enfant, le Petit Déjeuner sur l’herbe, La Danseuse, qui se dévisse dans son mouvement, ou son Hommage à la femme, souvent réduite à sa plus simple expression... Il aime dominer la machine à souder dans l’atelier de Villetaneuse, en passant par Pompéi et en continuant à Gennevilliers où il épouse la «presse à bagnoles» importée des États-Unis. La qualité essentielle de cette exposition, qui couvre la période de 1946 à 1966, est de nous montrer les œuvres des premiers fers aux compressions et donc, de retracer l’itinéraire de ce nouveau réaliste souvent et injustement disqualifié. L’image erronée du César des dernières années, inscrite dans la répétition sans la variation, enfermée dans les déclinaisons du pouce géant ou des compressions mégalomaniaques de voitures, s’efface devant le démiurge au Centaure, qui a cherché jusqu’à sa mort la fraîcheur de l’air du temps.


 Sophie Braganti
08.03.2003