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Musées

Richard Meier et Frieder Burda
devant la maquette de la
Sammlung Frieder Burda.
© Sammlung Frieder Burda.

Frieder Burda, collectionneur

L’un des trois héritiers du magnat de presse allemand a posé la première pierre de son musée d’art contemporain qui devrait ouvrir ses portes en septembre 2004, à Baden Baden.

Comment avez-vous constitué cette collection ?
Frieder Burda.
Je l’ai créée durant les trente dernières années. Ma première œuvre, je l’ai acquise à la Documenta de Cassel en 1968 : c’était un Fontana. À l’époque, je n’avais pas l’idée d’une collection. J’achetais juste une peinture. Mon père aimait l’art. Il possédait des expressionnistes allemands et de petits impressionnistes français. J’ai été élevé parmi ces œuvres. Puis, je me suis intéressé à l’expressionnisme abstrait américain - de Kooning, Rothko, Pollock, Still - sans jamais être vraiment touché par le pop art. Par la suite, j’ai eu la chance de faire la connaissance de Richter, Polke ou Baselitz et j’ai acheté certaines de leurs œuvres. Lorsque mon père est décédé, en 1986, sa collection a été partagée entre mes deux frères et moi-même. J’ai ainsi eu un ensemble de Macke, Kirchner ou Beckmann que j’ai complété avant que les Beckmann ne deviennent presque inaccessibles ! Enfin, j’ai acheté des Picasso de l’époque de Mougins, entre 1961 et 1973, car j’ai une maison dans cette ville.



C’est la première fois qu’une telle symbiose entre musée d’État et musée privé est réalisée en Allemagne.

Pourquoi avoir décidé de créer un musée ?
F. B.
Un jour, j’ai constaté que j’avais plus de cinq cents œuvres d’après-guerre et je me suis demandé ce que je voulais en faire. J’ai eu cette chance de pouvoir faire une annexe à la Kunsthalle de Baden Baden, une institution plus que centenaire. C’est la première fois qu’une telle symbiose entre musée d’État et musée privé est réalisée en Allemagne. Pour moi, c’était primordial. Je n’aurais pas voulu d’un petit musée isolé. Si la Fondation Maeght de Saint-Paul-de-Vence est, pour moi, un idéal, c’est aussi un acte de bravoure. Vous savez, avec 1 100 m2, nous n’aurions pas eu beaucoup de chance de réussir. En créant un centre d’art, nous évitons d’être statiques et nous nous donnons la possibilité d’être «vivants» en organisant de grandes expositions. Un musée, ça ne sert à rien si on n’a pas de visiteurs.

Vous êtes-vous personnellement impliqué dans la conception du musée ?
F. B.
Je l’ai voulu ici car je suis né près de Baden Baden et que j’y vis à nouveau depuis trente ans. Il est construit dans un endroit très sensible : un parc. Trois ans et demi ont été nécessaires pour avoir la permission de le construire. 10% des habitants de la ville étaient opposés au projet. On craignait que des arbres ne soient abîmés. Vous savez, en Allemagne, nous avons un mouvement vert très fort. Heureusement, nous sommes tombés d’accord sur cette réalisation, importante pour la ville. Pour le choix de l’architecte, j’ai parlé à tous les grands contemporains, notamment suisses et allemands. J’ai finalement préféré Richard Meier que je connaissais de longue date. Cette architecture, je la voulais faite pour la collection. Malheureusement, on ne pense pas aux œuvres en construisant les bâtiments. C’est encore le cas à la nouvelle Pinacothèque de Munich. Richard Meier était la seule personne capable de faire ce que je voulais et d’adapter son architecture à ma collection.


 Zoé Blumenfeld
03.12.2002