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Marché

Drouot vendu et retrouvé

Les commissaires-priseurs parisiens n’ont pas cédé aux sirènes des fonds d’investissement. Ils ont trouvé un acheteur pour les actifs de Drouot SA : eux-mêmes.


© Drouot
La structure de la galaxie Drouot, qui s’est toujours distinguée par une relative complexité, serait-elle en voie de rationalisation ? C’est ce que semblent augurer les manœuvres en cours autour d’une nouvelle structure, Drouot Patrimoine. Derrière la multiplicité des noms et des véhicules juridiques - Drouot SA, Drouot Holding, Drouot Patrimoine - se joue une partie relativement simple, dont Maître Delettrez, président de Drouot Holding, ne donnera la confirmation officielle qu’au début décembre. Des commissaires-priseurs voulaient quitter l’ensemble ? La possibilité leur en est ouverte, par l’intermédiaire d’une vente. Une vente à un tiers, comme on l’a supposé ? Non. L’acheteur s’appelle Drouot Patrimoine et ses actionnaires seront… les commissaires-priseurs. Du moins ceux qui veulent rester. À ceux qui veulent partir, il est offert une grande liberté de choix : soit une sortie définitive, soit un panachage, les commissaires-priseurs pouvant vendre une partie de leurs parts et obtenir le résidu en actions de Drouot Patrimoine. Cette nouvelle entité regroupera les actifs de Drouot SA, y compris la Gazette de l’hôtel Drouot, Le Moniteur des Ventes et Drouot Formation, auquel s’ajoutera le joyau de la SCI, l’hôtel des ventes Drouot Richelieu, mais pas Drouot Nord ni Drouot Véhicules.

À quand une véritable maison de ventes ?
Ce faisant, Drouot s’affirme-t-il davantage sur la place ? On est en droit d’en douter. Selon les estimations, la valorisation de l’ensemble qui confluera dans Drouot Patrimoine serait à peine supérieur à ce que proposait en son temps Pierre Bergé (soit 43 millions €) mais inférieur à ce qu’en offrait Barclays ou Axa. Une année d’attentisme a eu pour conséquence de mener à la constitution de forces concurrentes - autour d’Artcurial avec Poulain - Le Fur, Briest et, partiellement, Aguttes ainsi que le groupe Ivoire, constitué par douze maisons de province, ou autour de Pierre Bergé, avec Buffetaud, Chambres, Godeau et de Nicolay. L’occasion fiscalement très favorable (la transformation rétroactive, par la loi de juillet 2000, de la Compagnie parisienne des commissaires-priseurs en société anonyme a «effacé» les substantielles plus-values) va logiquement pousser un certain nombre de commissaires-priseurs à quitter Drouot et à réaliser leurs actifs (qui s’ajouteront à l’indemnisation en cours, aux soins de l’État). Mais l’on ne distingue pas encore de projet d’entreprise. L’idée défendue - par Pierre Bergé à haute voix, par d’autres plus discrètement - de créer une véritable maison de ventes ne semble pas séduire des actionnaires à l’individualisme marqué. Drouot, au périmètre rétréci, reste un hôtel des ventes. Avec une savoureuse couleur locale, mais sans stratégie d’ensemble.


 Rafael Pic
02.12.2002