Accueil > Le Quotidien des Arts > De l’art qui soigne

Marché

De l’art qui soigne

Jeune Création confirme une tendance artistique en vogue : transformer la médecine en poésie.

PARIS. Un ténia gonflable, haut de dix mètres, imaginé par le Groupe La Guardia se balançait bruyamment. À quelques mètres de là, sur des étagères, des résines aux allures de cires anatomiques étaient alignées par Sarah Rosem (dite SR Labo). Chacun de ses modelages, de ses moulages, représente les effets de nouvelles maladies professionnelles. Ainsi, la poitrine «labiale», possédant des bouches en guise de tétons, aurait appartenu à une productrice de télévision. En arpentant les allées de la nouvelle édition du Salon Jeune Création, on était frappé par l’abondance de seringues, d’éprouvettes ou de radiographies recyclées. Le monde est malade, les artistes de moins de trente ans le soulignaient, à des fins - qui sait ? - curatives. C’était frais, drôle, émouvant. Beaucoup de ces plasticiens à peine sortis d’écoles des beaux-arts s’en prenait aussi aux plantes d’intérieur. Ici, Laurent Vailler alignait des caoutchoucs de toutes les couleurs, là, Caroline Lejeune peignait en noir et blanc des sous-bois. Plus loin, Anne Zimmermann greffait une patte de canard sur un oignon de jonquille et Maïa Roger photographiait des tomates. Le message écologiste était clair.

Une connotation psychédélique
Parmi les travaux des cent cinquante exposants retenus cette année, on a retrouvé par ailleurs des tendances déjà bien présentes depuis quelques années, puisant leur inspiration dans les pratiques des artistes des années 1970. Voire, au-delà, dans celles des surréalistes : la capture d’images volontairement banales, concernant les grandes villes ou l’intimité du corps, la fabrication de jouets ou d’automates, l’utilisation abondante de matières synthétiques, notamment poilues, de couleurs acidulées et de motifs concentriques à connotation psychédélique. Autant de repères qui ont permis de prendre le pouls de l’imagination occidentale, dans une excellente ambiance. Orchestre, buvette, catalogue, comité d’accueil dynamique et sympathique, tout facilitait l’immersion. En se soignant, la jeune génération nous fait du bien.


 Françoise Monnin
11.03.2003