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Expositions

Bradshaw, briseur d’images

La Joconde sur un rideau de charcuterie ? C’est la façon qu’a choisie l’artiste anglais pour tordre le cou à l’histoire de l’art.


L’artiste, au premier plan, dans
son atelier.
© Galerie Thaddaeus Ropac.
PARIS. «Il faut briser les icônes», dit Philippe Bradshaw, qui a quitté l’East London pour Montreuil, parce que, dit-il, à Paris, les contacts avec les créateurs d'autres disciplines sont plus faciles. À des images empruntées, comme La Joconde ou L'Escarpolette de Fragonard, il ajoute des projections vidéos et du rock, ou du punk, mixé de main de maître puisqu'il est aussi DJ. L'essentiel, ce sont ces maillons enchaînés, qui pendent accrochés à un rail, formant un rideau comme ceux qui, jadis, interdisaient aux mouches l'accès des charcuteries et que des sex-shops ont, depuis, adoptés. Des maillons de douze couleurs, petites pièces d'un grand puzzle vendues dans les drogueries, que le créateur assemble un à un. Au total, il en a produit 24 kilomètres… Les entrelacs de couleur constitués par les chaînes restituent des images - comme la Statue de la Liberté, des chaussures, un crâne - inspirées souvent par Warhol (le rideau Electric Chair, de 240 x 300 cm, coûte 25 000 €). Ont-elles un sens ? Bradshaw rassure. «Qu'importe ces images ! dit-il. Avec leurs effets miroitants et flatteurs, elles ne sont que des archétypes et peuvent subir tous les outrages». Outrages policés : ce sont les vidéos, en projetant leur lumière, qui brouillent les pistes. Ces rideaux, avec leur imagerie naïve, inspirent une sorte de tendresse. Ils sont doux au toucher. Soumis aux projections, pris dans des accès de fièvre musicale, ils proposent une espèce de zapping cocasse. L'Anglais de Montreuil a trouvé là sa façon d’abattre les idoles.


 Nicole Duault
27.03.2003