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Milan après le futurisme

Véritable «retour à l’ordre» italien, le groupe Novecento, qui mêle des personnalités antagonistes, est enfin réévalué.


Anselmo Bucci, I Pittori
© Fondazione Mazzotta.
MILAN. Le Spazio Oberdan, près de Porta Venezia, a été créé récemment par la région de Lombardie pour offrir un nouvel espace d'exposition à l'art moderne. Et il y réussit parfaitement avec le Milan de l’entre-deux-guerres. Le personnage central de l’époque est la figure haute en couleurs de Margherita Sarfatty, dont Sironi nous a laissé plusieurs portraits. Originaire de Venise, cette critique est la fondatrice du groupe Novecento, dont la première exposition eut lieu au Palazzo della Permanente du 14 février au 30 mars 1926. Mussolini en personne - qui fut l'amant de la belle Vénitienne - vint l’inaugurer, en déplorant que bien peu des artistes présents aient composé une œuvre célébrant la révolution fasciste. Mais il conclut en affirmant se sentir plus proche que quiconque des artistes car il considérait que la politique était, dans son genre, un art au sens plein du terme…

Entre nostalgie et modernité
Le Novecento - qui signifie «XXe siècle» - est une sorte de «retour à l'ordre» à l'italienne : on le voit clairement aux paysages de Carlo Carrà. Mais les banlieues de Mario Sironi, aux géométries mélancoliques et aux tonalités ambiguës qui les accompagnent sur les cimaises montrent que les choses sont autrement contradictoires. Au fond, rien ne lie vraiment ces artistes les uns aux autres, sinon une volonté de rénover le langage de la figuration. Mais quels rapprochement peut-on faire entre Les Amies d'Emilio Malerba, Eve d'Achille Funi, Les Montagnards d'Ubaldo Oppi et L'Automne de Piero Marussig ? Bien peu de choses, si ce n’est la revisitation très subjective de la peinture ancienne. Il faut plutôt voir ici une tentative de renaissance des arts figuratifs dans une optique curieuse, associant nostalgie et modernité. L'intérêt de cette exposition est de nous montrer les principaux protagonistes de cette aventure esthétique, mais aussi de présenter des artistes mineurs ou parfois inconnus, comme Siro Penagini, Esodo Pratelli, Carlo Sbisà (et son incroyable Cité déserte faisant écho à la Cité idéale), Primo Sinopico et d'autres encore. Tous ne valent pas d'être exhumés, sinon pour servir l'histoire de l'époque. Mais l'ensemble sort de l'ordinaire et fournit l'occasion de réviser notre opinion sur un art encore méprisé il y a encore une dizaine d'années.


 Gérard-Georges Lemaire
02.04.2003