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Musées

Ann Hindry, collection Renault

Son conservateur explique la genèse du fonds Renault d'art moderne.


rman, accumulationd'éléments
mécaniques, 1974,
300 x 200 x 16 cm
© Georges Poncet, Renault
Quel est l’historique de la collection Renault ?
Ann Hindry.
Elle a débuté sous l’impulsion de Pierre Dreyfus, qui a été le patron de Renault de 1955 à 1975. A l’époque, en 1967, il s’agissait d’effectuer un rapprochement entre deux champs qui s’ignoraient, le monde de l’art et la grande industrie. Au départ, Renault apportait une aide technique aux artistes, qui restaient propriétaires des œuvres. Par la suite, il y a eu un changement de politique et les œuvres ont été achetées aux artistes. Elles étaient notamment exposées à l’abbaye de Sénanque - qui appartenait à Berliet ! La collection, animée par Claude-Louis Renard, a été poursuivie sous les directions de Bernard Vernier-Palliez et de Bernard Hanon puis arrêtée de façon catégorique, en 1985, par Georges Besse. Cette brutalité était symbolique : il s’agissait de faire un exemple, de montrer que Renault, face aux difficultés, se recentrait sur son métier.

Que contient la collection ?
A. H.
Environ trois cents œuvres. Il y a notamment une cinquantaine de Dubuffet, ce qui en fait la plus grande collection privée de l’artiste. L’entreprise était très sensible aux artistes qui s’intéressaient au monde de l’industrie. Il y a donc de nombreuses accumulations d’Arman, composées à partir de pièces de moteurs - culasses ou pompes à eau -, dont on trouve d’autres exemplaires dans les grands musées du monde. Il y a aussi des Soto, des Dewasne, des Le Parc, des Erró, des Vasarely. A ce propos, on peut rappeler que le logo de Renault a été dessiné par Yvaral, le fils de Vasarely. On trouve aussi des ensembles plus curieux, comme ces tableaux de Henri Michaux. En 1983, en travailant pour une exposition à Sénanque, il s’est rendu compte que son allergie à la térébenthine avait disparu ! Il a réalisé dans la foulée dix peintures à l’huile. Il n’a d’ailleurs jamais pu les voir exposées puisqu’il est mort avant l’exposition de 1985…

Circule-t-elle hors des bâtiments de l’entreprise ?
A. H.
L’impulsion pour réveiller cette Belle au bois dormant est venue de Louis Schweitzer. J’ai été nommée commissaire en 1996, il n’y avait personne avant moi. Nous avons publié un catalogue et engagé une politique de prêts. Il y a bien sûr le célèbre Requiem pour une feuille morte de Tinguely en dépôt au Centre Pompidou. Mais nous prêtons également pour des expositions temporaires : actuellement un Gleizes à Lisbonne, des Niki de Saint Phalle à Nice et Angers. Nous préparons une importante rétrospective de cent cinquante œuvres pour cet été : en raison des liens entre Nissan et Renault, elle aura lieu au Japon, au Sompo Museum of Art.


 Rafael Pic
14.04.2003