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Expositions

Les ors du Nô

La Fondation Mona Bismarck présente une exceptionnelle collection de costumes japonais.


Choken à décor de papillons et
d'herbes sauvages © Yamaguchi Noh,
Kyoto
Au XIVe siècle, Kanami et son fils Zeami eurent l’idée de puiser dans la tradition populaire des gengaku pour renouveler la représentation des histoires d’amour ou de chevalerie qui plaisait à l’entourage du Shôgun. Dorénavant, les récits seraient courts mais denses, centrés sur une émotion. Acteurs et auteurs, ils fixèrent ainsi le répertoire et les codes d’un genre théâtral nouveau : le Nô. Près de six siècles plus tard, ils sont toujours de mise. Pourtant, la survivance du Nô n’a pas toujours été de soi. Avec l’avènement de l’ère Meiji, les cinq grandes familles d’acteurs perdirent leurs mécènes, rompant l’équilibre cet art élitiste soutenu par l’aristocratie.

Les costumes du Nô témoignent de cette histoire. Jusqu’à la fin du XIXe siècle, ils furent largement inspirés par la mode en vigueur à la cour, et pour cause. Au terme des représentations, les spectateurs de haut rang témoignaient parfois de leur satisfaction en offrant aux acteurs des tuniques en fils de soie rehaussés d’or ou d’argent. Or, la fin de la féodalité sonna également la disparition des pigments et des savoirs-faire nécessaires à la réalisation de ces vêtements.

Alors que le Nô a atteint une nouvelle popularité, Akira Yamaguchi, lui-même fils d’un tisserand de Kyoto, a lancé le pari de renouer avec cette tradition. Il collectionne les somptueux costumes de l’époque Edo pour les étudier et en créer des exemplaires à l’identique, avec une seule différence de taille… la morphologie des acteurs ayant évolué ! La Fondation Mona Bismarck met en scène une cinquantaine de ses costumes anciens et modernes. Exposées sur des estrades et des présentoirs, les larges robes féminines aux motifs de fleurs ou de papillons et les raides costumes d’hommes noir et or, ornés de nuages chinois ou de roues bouddhiques sont mis en regard de masques traditionnels, de photographies et d’estampes japonaises qui restituent, avec bonheur, l’ambiance du théâtre nô.


 Zoé Blumenfeld
30.04.2003