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Marché

Souvenirs de la maison Hottinguer

Christie’s vend l’entier contenu de l’hôtel particulier des Hottinguer. Cet ensemble ne compte pas d’œuvre majeure mais représente une tranche de vie de la haute aristocratie financière.


Attribué à Giovanni Battista Foggini,
Italie, fin du XVIIe ou début du XVIIIe siècle.
Groupe en bronze représentant Apollon
écorchant Marsyas.
Est. 150 000 - 250 000 euros
PARIS. «Christie’s se livre là à un exercice assez rare, expliquait Bertrand du Vignaud, son promoteur, lors des journées d’exposition : présenter ces objets dans leur contexte». Leur contexte, c’était, il y a quelques jours encore, un hôtel particulier de la rue de la Baume, derrière l’église Saint-Philippe-du-Roule. Cette bâtisse néo-XVIIIe siècle, bâtie en 1906 pour une célèbre dynastie de banquiers venus de Bâle et de Zurich, a été occupée, jusqu’à son décès en 2002, par la baronne Hottinguer. Durant tout le siècle passé, elle a accueilli de mémorables réceptions. En 1913, Nijinsky, l’étoile des Ballets russes, dansa dans le jardin embrasé d’ampoules électriques.


Chèvre en porcelaine,
Japon, fin de la période Edo,
datée de la première année de
Keio (1865)
Est. 30 000 - 40 000 euros
L’axe Hottinguer-Delessert
En 1832, le mariage de Jean-Henri Hottinguer avec Caroline Delessert devait rapprocher les Hottinguer d’une autre dynastie de la haute finance. Elle devait aussi faire entrer dans leur orbite une partie de la célèbre collection Delessert, dont les plus beaux éléments furent dispersés lors d’une célèbre vente de quatre jours en 1869. Les œuvres proposées dans cette nouvelle vacation, cinq générations plus tard, n’ont pas la même importance : ni Vierge à l’Enfant de Raphaël (au Musée Condé de Chantilly) ni Portrait de Wille (au Metropolitan Museum). Mais les sept cents lots ont ont de quoi intéresser tout un éventail de collectionneurs. Pour ceux qui n’enchériront pas, ils se lisent comme une page d’histoire, comme la coupe d’un intérieur d’une des «deux cents familles» : des bouquetières de Niderviller (1 000 euros) ou des boîtes à savonnettes en porcelaine de Sèvres, des tables à tric-trac, deux paravents en bois laqué du Coromandel du XVIIe siècle (15 000 et 20 000 euros), des fauteuils à la reine, un baromètre Louis XVI (2 000 euros), des vases en porphyre ou la première édition du classique de Tocqueville, De la démocratie en Amérique (500 euros).


Berceau de la fin du XIXe
siècle. Est. 400 - 600 euros
Le Foggini de Fabius
Quelques lots, au-dessus de 100 000 euros, pourraient attirer l’attention des institutions. Il en va ainsi d’Apollon et Marsyas, un petit groupe en bronze d’un sculpteur du baroque tardif, le Florentin Giovanni Battista Foggini (1652-1725), acheté en 1952 auprès d’un expert réputé du XVIIe siècle, la galerie Fabius, qui devait plus tard s’illustrer avec la vente à la National Gallery of Art de Washington d’une Madeleine de Georges de La Tour. Estimé entre 150 000 et 250 000 euros, ce bronze devrait être un des clous de la vente. Même si leurs estimations sont légèrement inférieures, une composition florale de Jan Frans Van Dael (1764-1840), une commode d’époque Louis XV en laque de Chine ou une paire d’encoignures de Riesener pourraient être l’objet des enchères les plus disputées. Une cinquantaine d'aquarelles d'Eugène-Louis Lami (1800-1890), un tableau orientaliste d'Adrien Dauzats (1804-1868), des dessins de Boucher et Hubert Robert complètent cette «house sale», un exercice que les maisons anglo-saxonnes pratiquement couramment mais qui est encore peu fréquent en France.


 Rafael Pic
02.12.2003