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Patrimoine

L'enseignement toutes couleurs dehors

L'Institut des métiers de l'artisanat, à Villiers-le-Bel, par Forgia et Leneveu, symbolise une nouvelle race d'établissements de formation professionnelle.


Institut des métiers de l'artisanat
à Villiers-le-Bel, Forgia et
Leneveu architectes
VILLIERS-LE-BEL. Depuis la grande époque hygiéniste des années vingt et trente - avec notamment les réalisations de Marcel Lods en banlieue parisienne - la construction d'établissements scolaires a connu un long purgatoire, marqué par l'utilisation de matériaux médiocres, souvent préfabriqués, une grille contraignante de standardisation (portant par exemple sur la taille des fenêtres) et une gamme chromatique très pauvre. L'incendie du lycée Pailleron, en février 1973, a été l'emblème le plus tragique de cette génération de bâtiments. Les temps ont changé. Même dans l'enseignement professionnel, longtemps parent pauvre, on a mesuré l'intérêt de faire appel à des architectes pour établir un projet cohérent : pour le cadre de travail, pour faciliter la vie en communauté et, en fin de compte, pour motiver les élèves. Le Centre de formation en alternance de Villiers-le-Bel, inauguré à la rentrée de septembre et encore en phase de «rodage», symbolise ce nouveau cours.


Institut des métiers de l'artisanat
à Villiers-le-Bel, Forgia et
Leneveu architectes
Oublier la haute tension
Voulu par la Chambre des métiers du Val d'Oise pour remplacer le centre d'Arnouville-les-Gonesse, il a vu le maître d'ouvrage collaborer de très près avec les lauréats du concours lancé en 2000, l'équipe Arteo Architectures menée par Anne Forgia et Didier Leneveu. «Nous n'avons eu que douze mois pour la réalisation, ce qui est un délai très court, expliquent les architectes. Mais, chose rare, nous avons été chargés de l'ensemble du programme, de la conception du bâtiment, à son mobilier et à son équipement.» Le résultat est convaincant. Sur une parcelle guère avenante - coincée entre une route au fort trafic, un champ de lignes haute tension et le couloir aérien de Roissy - les architectes ont conçu un bâtiment économique (9,5 millions d'euros pour près de 8 000 mètres carrés de plancher), où sont accueillis 1200 apprentis âgés de 16 à 18 ans. Une immense charpente métallique couvre des rues intérieures et cinq «boîtes», correspondant aux deux activités enseignées - la mécanique automobile et les métiers de bouche -, à l'espace administratif, au self-service et à l'amphithéâtre, qui se dresse comme un phare rouge. Les couleurs sont administrées avec profusion, de la couverture en verre multicolore, «à la Buren», du restaurant jusqu'à l'original béton froissé noir de la façade, en passant par les pavements et les murs. Goethe, auteur d'une théorie des couleurs, aurait apprécié l'environnement. Quant au directeur, il mesure le sentiment des apprentis en leur offrant de retourner à l'ancien centre d'Arnouville : une proposition très fraîchement reçue… Reste à savoir si l'environnement favorable influera sur le taux de réussite des élèves, qui avoisine les 70% pour les CAP. En attendant la réponse, dans deux ans, l'intérêt des chambres de métier d'autres régions pour cette réalisation semble augurer la naissance de structures similaires.


 Rafael Pic
30.12.2003