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Musées de Paris : très chère gratuité

Deux ans après l'institution de la gratuité, la fréquentation des musées parisiens a fortement augmenté. Mais cette politique a un coût, surtout en période de grands travaux.


Le musée Carnavalet
© Christophe Fouin
PARIS. On sait que les grands musées anglais, où le gouvernement a institué la gratuité il y a deux ans, se trouvent aujourd'hui dans une délicate situation financière. Leurs directeurs ne cessent de tirer la sonnette d'alarme : manque de gardiens, salles fermées, budgets d'acquisition en baisse. En somme, une gratuité qui ne présente pas seulement un visage avenant… En brossant le tableau des musées de la Ville de Paris, où la même mesure s'applique depuis la même date, Sandrine Mazetier, adjointe au patrimoine dans l'équipe de Bertrand Delanoë, n'a voulu en souligner que les bons côtés : la hausse de la fréquentation. Celle-ci est en effet spectaculaire. Sur les douze musées de la ville actuellement ouverts au public, celle-ci est passée, collections permanentes et expositions temporaires confondues, d'environ un million de visiteurs en 2001 à plus de 1,5 million en 2003, soit une progression de 50%.


Le musée Zadkine
© Christophe Fouin
Carnavalet superstar
L'évolution est fort contrastée en fonction des musées. Carnavalet, qui se trouve «en pein centre, sur un parcours de promenade», comme l'a bien rappelé Sandrine Mazetier, est le vainqueur absolu. Des 150 000 entrées de 2001, on est passé en 2003 à environ 600 000. Dans un établissement aux salles intimistes, avec recoins et escaliers, un accroissement aussi subit et d'une telle ampleur ne peut manquer de poser des problèmes en termes de sécurité, de protection des collections, de services aux visiteurs. Mais un bilan de ce type n'a pas été communiqué à ce jour. Le Musée d'art moderne a bondi de 100 000 visiteurs à plus de 200 000. 2004, année de fermeture pour des travaux de remise aux normes (estimés à près de 15 millions d'euros), remettra-t-elle en cause cette dynamique ? Même constat positif au Musée Victor Hugo, place des Vosges, qui est passé de quelque 50 000 entrées à plus de 100 000. Parmi les «petits» musées, qui ont tous une fréquentation inférieure à 35 000 personnes, l'évolution est plus contrastée. Après une forte hausse en 2002, 2003 a été marqué par une stabilisation voire par une baisse (Zadkine, Vie romantique, Cognacq-Jay, Mémorial Leclerc).

70 millions pour le Petit-Palais
On semble donc assister à un élargissement du fossé entre des musées de première division et d'autres de seconde division, plus «difficiles», où la fréquentation dépend beaucoup de l'offre en termes d'expositions. Or, celles-ci sont en forte contraction. Certains musées - Balzac et Cognacq-Jay - n'en accueilleront pas même une en 2004. De même, le budget global d'acquisition d'œuvres d'art est en baisse de 3,9 millions d'euros en 2003 (année faste, il est vrai) à 1,1 million en 2004. On pourra se consoler en se disant que ces économies budgétaires sont moins causées par la perte de droits d'entrée (environ 500 000 euros par an) que par l'ambitieux programme de travaux. Le Musée Cernuschi rouvrira au printemps 2005, après une métamorphose d'un coût de 7,1 millions d'euros. Des extensions ou transformations, pour des montants mineurs, sont en programmées aux Catacombes, au Mémorial Leclerc, à Carnavalet. Mais le chantier le plus important est de loin celui du Petit Palais : environ 70 millions d'euros. Il sera inauguré fin 2005, avec une bonne année d'avance sur son vis-à-vis, le Grand Palais.


 Rafael Pic
14.01.2004