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Patrimoine

11 septembre : la mémoire en creux

Le projet amendé de mémorial, dû à Michael Arad, a été présenté la semaine dernière. Deux quadrilatères vides y marquent la présence des tours.


Michael Arad, New York, NY et
Peter Walker, Berkeley, CA
Photo : Jock Pottle/Esto
NEW YORK. Si la presse internationale a surtout suivi les projets de reconstruction des tours du World Trade Center - un concours remporté par Daniel Libeskind - les New Yorkais ont été très sensibles à son complément, bien plus petit dans l'espace mais symboliquement aussi fort : le mémorial. Le jury a reçu 5201 projets, provenant de 63 pays. Le vainqueur, sur une première sélection de huit finalistes, a été annoncé le 6 janvier 2004. Il s'agit d'un jeune architecte israélien, Michael Arad. Installé aux Etats-Unis depuis 1991, il est diplômé du Georgia Tech College of Architecture. Après avoir travaillé trois ans pour l'agence Kohn Pedersen Fox, il est employé depuis 2002 par la New York City Housing Authority, pour laquelle il a notamment dessiné deux postes de police. Le projet lauréat, retravaillé avec l'aide de l'architecte paysagiste Peter Walker, a été présenté sous une forme plus achevée - mais pas encore définitive - le 14 janvier.


Michael Arad, New York, NY et
Peter Walker, Berkeley, CA
Photo : Jock Pottle/Esto
Deux trous dans New York
Dans la conception d'un monument aussi particulier, la référence évidente était le mémorial consacré à la guerre du Vietnam, à Washington. Dévoilé en 1982, il était l'œuvre d'une jeune étudiante de 21 ans, Maya Lin (dont l'agence vient d'ailleurs de mettre au point la nouvelle scénographie du Pavillon de l'Arsenal à Paris). D'une popularité indéniable, c'est un mur de granite à demi enterré, en forme de V sur lequel sont inscrits les noms de tous les morts et disparus du conflit. Michael Arad a lui aussi voulu rendre tangible l'absence - le mémorial est avec justesse baptisé Reflecting Absence - mais d'une autre façon. Là où s'élevaient les deux tours se trouvent maintenant deux trous, qui reproduisent leur périmètre. A un niveau inférieur, ces quadrilatères béants se transforment en bassins, alimentés par des cascades, et entourés par un déambulatoire, d'où l'on peut lever les yeux vers le ciel pour, encore une fois, visualiser les masses disparues. Cette forme reprend clairement celle des cloîtres, lieux privilégiés de méditation. Peter Walker a conçu le manteau végétal qui a pour objet de signifier la renaissance, la régénération. Reste encore à définir le moyen d'intégrer, selon le vœu des familles des victimes, les vestiges de l'attentat - fragments de poteau ou véhicules de pompiers - qui sont actuellement conservés dans le hangar 17 de l'aéroport international John Kennedy. La sphère mobile de Fritz Koenig, Sphere for Plaza Fountain, créée en 1971 et qui a résisté à la catastrophe pourrait également y trouver place.


 Charles Flours
19.01.2004