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Musées

La Royal Academy plus anglaise que jamais

La restauration de salles d'apparat du XVIIIe siècle permet enfin de présenter une partie de la collection permanente.


The John Madejski Fine Rooms
The General Assembly Room
Photo : Francis Ware 2003
© Royal Academy Of Arts London
LONDRES. Les grandes expositions temporaires sur les Aztèques, les Préraphaélites ou Monet ? On continuera bien sûr de fréquenter la Royal Academy pour les admirer mais on pourra désormais voir davantage : l'institution vient d'ouvrir au public de nouvelles salles, offrant un échantillon de ses immenses collections permanentes. «Ce fonds a été partiellement visible jusqu'en 1939, explique la commissaire en chef, MaryAnne Stevens. Puis il a été conservé en divers lieux, notamment une station du métro londonien. Notre ambitieux plan de rénovation, engagé il y a quelques années, nous a amenés à climatiser l'ensemble de la Royal Academy et à refaire la cour d'honneur. La restauration des cinq salles palladiennes de l'étage noble, construites en 1717 à la demande du propriétaire, lord Burlington, fait partie de ce programme. C'est là que la collection permanente sera maintenant exposée, par roulement.» Il ne s'agit, il faut le dire, que d'une petite sélection d'une quarantaine de tableaux et d'une dizaine de bustes. Les Madejski Rooms, ainsi rebaptisées du nom du mécène qui a donné 3 millions £ pour leur restauration, ne peuvent guère en accueillir plus.


Stanley Spencer R.A.
The Farm Gate (vers 1946)
Huile sur toile, 88.9 x 57.1 cm
Photo © Royal Academy of Arts,
Londres 2002 Estate of Stanley
Spencer R.A.
Photographie : J Hammond
Avec le cadre, s'il vous plaît
Fondée en 1768 sous George III, la Royal Academy est un organisme de formation professionnelle qui s'inspire alors de son antécédent français, l'Académie royale de peinture et de sculpture voulue par Le Brun. Installée en 1780 dans Somerset House, puis en 1837 à la National Gallery, elle prend en 1860 ses quartiers dans Burlington House, sur Piccadilly. Ses membres étaient autrefois au nombre de quarante. Ils sont maintenant quatre-vingt et dérogent malheureusement à l'ancienne tradition de se portraiturer les uns les autres. Mais toutes les traditions ne se perdent pas. Les nouveaux membres sont toujours choisis par voie élective et ils sont, comme au temps de Reynolds ou Constable, tenus d'offrir un tableau à la Royal Academy pour recevoir le titre de RA (Royal Academician). «Depuis les débuts, les règles voulaient que ce tableau ne soit pas un autoportrait, ajoute MaryAnne Stevens. Et il devait absolument être encadré. Ce qui fait que la Royal Academy est devenue un lieu unique pour étudier l'histoire de l'encadrement depuis deux siècles et demi.»

Retrouver Turner et Constable
Sous les dorures restaurées avec soin, sous les fresques de Sebastiano Ricci, ont pris place les grands noms de la Royal Academy. On y voit de beaux portraits comme ce prince de Galles, futur George IV, transfiguré par William Beechey en chef de guerre mince et romantique, la chevelure bohême, un élégant foulard au cou… pour cacher son goître. Le président Joshua Reynolds s'est représenté pensif, en professeur de droit, le texte de son discours annuel roulé dans la main. A côté de lui, voici l'ensemble des académiciens - dont deux femmes, Angelica Kaufman et Mary Lloyd - peints par Henry Singleton ou la salle des moulages vue par Johann Zoffany. Les deux ensembles les plus attendus sont les gravures de Turner, issues de son , et les paysages de Constable, incluant ses effets d'atmosphère, ses vues de Brighton ou son célèbre Cheval bondissant de 1825, récemment vu à la rétrospective parisienne. Mais les commissaires ont aussi eu la bonne idée de présenter une école moins connue, celle de la «Dream Reality», qui trouve en William Blake une de ses principales sources d'inspiration. Les tableaux de Stanley Spencer, Algerton Newton ou Charles Sims ne sont qu'une poignée mais ils offrent un premier aperçu sur ce Réalisme magique du XXe siècle si mal connu en France.


 Rafael Pic
15.03.2004