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Patrimoine

Ferrare, capitale de la restauration

Grâce à son salon Restauro, dont c'est la onzième édition, la ville italienne est devenue le rendez-vous des professionnels du patrimoine.


© D.R
FERRARE. Un salon culturel à vocation professionnelle, aujourd'hui, ne peut se contenter d'aligner une longue file de stands. Il doit proposer également un riche menu de colloques, rencontres, débats et expositions. C'est du moins le credo de Restauro, le salon de la restauration, lancé en 1991 dans la capitale de la famille d'Este, qui propose en quelques jours 103 rencontres de ce type, d'une «Introduction à la biologie végétale pour la conservation des livres et manuscrits» à «techniques de thermographie infrarouge» ou à un «bilan de la restauration des enduits et des fresques de l'oratoire de la Passion à la basilique Saint Ambroise de Milan». «La fréquentation a suivi une augmentation constante depuis les débuts en 1991, explique Anna Maria Vigilante, la directrice de la communication. En 2003, pour la 10e édition, nous avons reçu 28 400 visiteurs et nous en attendons plus de 30 000 cette année. A cela, il faut ajouter le poids des délégations nationales, chacune comptant plusieurs dizaines de personnes, qui sont spécialement invitées chaque année. En 2004, elles viendront notamment de Russie, d'Ukraine, du Chili, de Turquie, d'Egypte ou de Jordanie.» Autant de pays qui viennent s'informer des dernières techniques ou prendre contact avec les producteurs de mosaïque, de travertin, d'aciers spéciaux ou de machines-outils. Malgré le développement de la manifestation, les quelque 260 exposants restent, dans leur grande majorité, italiens. «Nous avons participé à Restauro il y a quelques années, explique Pierre Chevallier, président de l'entreprise homonyme, spécialisée dans les tapisseries, et de la SEMA (Société des métiers d'art). Il n'est pas facile de s'introduire sur ce marché même si nous avons récemment réalisé une intervention importante, avec le mécénat de la famille Agnelli : la restauration des tapisseries de Capodimonte».


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Quel statut pour les restaurateurs ?
Dans les allées, il sera beaucoup question du statut juridique des restaurateurs. En Italie, depuis la loi Merloni de 1994, ceux-ci sont assimilés aux entrepreneurs du BTP. Beaucoup estiment que cela n'a pas permis d'améliorer une transparence insuffisante dans les passations de marchés publics. Cette législation aurait, en revanche, eu un effet pervers, poussant les commanditaires à retenir comme critère de choix essentiel le chiffre d'affaires des restaurateurs plutôt que leur compétence. Le débat est rendu encore plus brûlant par un projet de loi sur l'introduction d'un cursus universitaire de cinq ans, auquel s'opposent les écoles spécialisées comme l'Istituto centrale per il restauro et l'Opificio delle Pietre dure de Florence. «En France, aussi, ça bouge beaucoup dans le domaine de la restauration, conclut Pierre Chevallier. Le débat porte sur le titre précis à donner pour éviter la confusion entre restaurateurs traditionnels et restaurateurs de niveau 2. Ces derniers sont les seuls habilités à intervenir dans les musées de France depuis la loi de 2002. Ce sont les diplômés de l'Institut national du patrimoine (INP), de l'ex-IFROA, des écoles d'Avignon et de Tours, de la MST de Tolbiac (Maîtrise en Sciences et Techniques option Conservation), soit environ mille personnes, auxquelles s'ajoutent les restaurateurs traditionnels reconnus aptes par une commission d'habilitation». Celle-ci, instituée en 2003, a adoubé 91 restaurateurs, en a recalé 9 et en a ajourné une dizaine, qui doivent suivre de nouveaux cycles de formation. Alors que l'Europe s'apprête à accueillir dix nouveaux membres, le marché unique n'est pas encore une réalité dans le domaine de la restauration…


 Carlo Farini
25.03.2004