Musée national
Marc Lathuillière
Une préface de Houellebecq, voilà qui n’est pas fréquent. Notre auteur national s’en prend à une France immobile où les Français se bornent à « jouer le rôle de Français ». Dans un monde homogénéisé, la seule façon d’entretenir la tradition consiste-t-elle à mettre les personnages en scène dans un décor lisible comme un cliché ? Entre constat objectif et dérision, c’est ce à quoi s’attache l’auteur, qui, en Guillotin d’un autre genre, s’est employé à couper les visages de ses modèles (plutôt à les affubler d’un masque) et à les entourer de symboles évidents : le mouton pour l’éleveur, les pots pour la confiturière, le salon de marbre d’une préfecture pour le stagiaire de l’ENA. De quoi créer le panthéon « beauf » d’une nation en perte de vitesse… Cette perte de de repères, cette uniformisation, et, par contrecoup, cette recherche désespérée de racines factices sont-elles propres à la France ? Du redneck américain en chemise à carreaux au berger Masaï en couverture rouge, jusqu’à la chanteuse andalouse agitant ses castagnettes, notre gigantesque société du spectacle est une insatiable productrice d’icônes.
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Critique parue dans la newsletter N° 364 - du 6 novembre 2014 au 12 novembre 2014