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N° 71 - du 13 décembre 2007 au 19 décembre 2007

L'AIR DU TEMPS

McCarthy, du ketchup au chocolat

Il a fait partie des artistes les plus transgressifs de sa génération, produisant des installations joyeusement obscènes où coulaient de nombreux fluides corporels, dont le sang matérialisé par du ketchup. Maintenant qu’il est établi, respecté (et à l’honneur dans une rétrospective actuellement au SMAK de Gand), Paul McCarthy semble s’être mis en tête de ne plus être obscène mais de dénoncer l’obscénité. En l’occurrence celle qui consiste à déverser des tombereaux de dollars sur l’art contemporain pourvu que les créateurs sur lesquels on mise – aussi jeunes et inconnus soient-ils - puissent rapidement devenir des marques monnayables. McCarthy a donc choisi de jouer à fond le rôle de l’artiste démiurge, qui transforme en or tout ce qu’il touche. Il a créé à New York, à la galerie Maccarone, une usine temporaire de pères noël en chocolat. Les siens – 1000 seront produits chaque jour - n’ont rien de particulier si ce n’est qu’ils coûtent 100 $ pièce. Ils sont certainement sucrés à point. Mais l’on salive surtout devant la savoureuse démonstration que jamais l’art n’a autant été une marchandise périssable.

Le site de l'usine à pères noël

EXPOSITIONS

Paris-Bordeaux en 1900

BORDEAUX – Trois cents œuvres divisées en deux lots : d’un côté le Parisien Alfred Roll (1846-1919) à la Galerie des beaux-arts, de l’autre le Bordelais Alfred Smith (1854-1936) au Musée des beaux-arts. Des tableaux peu connus, à découvrir, mêlés à des Sisley, Bérault, Boudin et à un chef-d’œuvre sulfureux, la fameuse Rolla (sans lien de parenté avec Roll…) de leur contemporain Henri Gervex, une courtisane nue et endormie sur son lit. Roll, fils d’un fabricant de meubles, et Smith, ancien commis d’agent de change, ont tissé une amitié solide tout en connaissant une évolution asymétrique, le premier privilégiant une peinture naturaliste aux thèmes sociaux, le second s’ouvrant timidement à l’impressionnisme dans ses nombreux paysages. En retraçant le parcours de ces deux peintres mineurs, l’exposition étudie comment les innovations de la capitale arrivaient atténuées en province et comment, dans l’autre sens, les réseaux et les salons locaux aidaient les peintres bordelais à avoir une carrière nationale honorable.

  • Peinture et société au temps des impressionnistes au Musée des beaux-arts et à la Galerie des beaux-arts, du 6 décembre 2007 au 6 avril 2008

    Le site du musée des Beaux-Arts

  • Forêt vierge dans le Pas-de-Calais

    LILLE – C’est la première fois qu’une exposition dans un Muséum d’histoire naturelle est labellisée d’intérêt national. Celle-ci, intitulée « Pays’âges », avec un jeu de mots pas forcément convaincant, reonstitue en grandeur nature l’évolution des paysages qui ont donné naissance au bassin houiller. La première section est évidemment la plus frappante puisque l’on est plongé dans une luxuriante forêt tropicale avec force insectes géants : ainsi se présentait la région lilloise il y a 300 millions d’années… Les débris organiques ont donné naissance au charbon, dont l’exploitation a dessiné le paysage actuel du Nord-Pas-de-Calais : c’est l’objet de la deuxième partie de l’exposition. La dernière section a une volonté prospective et cadre évidemment avec les alarmes sur le réchauffement de la planète : qu’en sera-t-il demain ? Jamais le paysage n’a été autant considéré comme faisant partie du patrimoine. Certains pays, comme le Monténégro, ont même sacralisé sa protection en l’inscrivant dans leur Constitution. Un exemple à suivre…

  • Pays’âges au Muséum d’histoire naturelle du 16 décembre 2007 au 3 août 2008

    Le site du Muséum

  • Sottsass 90

    TRIESTE - C’est l’un des monstres sacrés du design. Pour ses 90 ans, Ettore Sottsass (né en 1917 à Innsbruck) a accepté qu’on lui consacre une exposition rétrospective, à condition qu’elle soit de petite dimension et qu’elle soit émouvante – « qu’on en sorte en pleurant ». C’est à Trieste, ville à califourchon entre l’Italie et le monde mitteleuropéen et d’où était originaire l’artiste qui l’initia à la peinture (Spazzapan) que l’événement a été organisé. Les 130 objets présentés ne le sont pas par ordre chronologique mais thématique. Le design constitue évidemment la première des sept sections. Suivent l’architecture, la photographie, la joaillerie, le dessin, la céramique, le verre. A côté des icônes de Sottsass - les machines à écrire Olivetti, qui ont joué un rôle écrasant dans sa notoriété, ou le mobilier réalisé avec le groupe Memphis, le public peut découvrir des pièces jamais exposées.

  • Ettore Sottsass au Salone degli Incanti, du 6 décembre 2007 au 2 mars 2008

  • PATRIMOINE

    Du nouveau à la Villa des Papyrus

    POMPÉI – Le monde de l’archéologie bouge en Italie. Après la découverte supposée du lupercale, la grotte romaine où la louvre aurait allaité Romulus et Remus, la surintendance archéologique de Pompéi vient d’annoncer une autre trouvaille importante : celle d'un trône en bois et ivoire, mis au jour dans la Villa des Papyrus à Herculanum. C'est le premier de ce genre à être parvenu jusqu'à nous. Jusqu'à présent, ce type de mobilier n'était connu que par des reproductions sur des fresques, dont celle de la villa de la Farnesina à Rome. Le motif décoratif en bas-relief représente le dieu Attis ramassant des pommes de pin. Le culte de ce berger phrygien s’est développé à Rome parallèlement à celui de Cybèle, sa mère adoptive. La villa des Papyrus, découverte en 1752, avait livré une extraordinaire moisson de rouleaux de papyrus – près de 2000, essentiellement en grec, dont certains ont révélé des textes classiques comme De la nature d’Epicure, encore en cours de déchiffrage.

    Le site de la surintendance archéologique de Pompéi et Herculanum

    L'ARTISTE DE LA SEMAINE


    Seuil, courtesy de l'artiste

    Eric Rondepierre : du cinéma avant toute chose

    Eric Rondepierre (né en 1950) fait partie de ces artistes qui préfèrent remuer incessamment la même matière plutôt que de s’éparpiller en mille directions différentes. Son obsession à lui, c’est le cinéma. De l’image animée, il tire un plan immobile, lequel n’est jamais dû au hasard. Eric Rondepierre choisit ses photogrammes après de longues recherches dans les archives. Il recherche la faille, l’inattendu, l’invisible (ce qui laisse une grande latitude de choix puisque 24 photogrammes défilent chaque seconde devant les

    prunelles du cinéphile…). Qu’il s’agisse d‘images dégradées (« Précis de décomposition ») ou de planches noires qui ont été intercalées dans la restauration de films pour assurer la synchronisation (« Excédents »), Rondepierre travaille par séries. Et prend, dans les frontières qu’il s’est fixées, une liberté toujours plus grande : il utilise comme pixels les lettres d’un de ses textes (« Loupe/Dormeurs ») ou mixe, comme dans l’exposition en cours à la galerie Léo Scheer, images de films et images de son quotidien.

  • Eric Rondepierre, Partie communes, galerie Léo Scheer (14 rue de Verneuil, 75007 Paris), jusqu’au 22 janvier 2008.

    Le site de la galerie Léo Scheer

  • LIVRES

    Collectionneur d’éros

    Alors que la Bibliothèque nationale de France expose son Enfer, voici un ouvrage bien dans le ton. Sous une couverture en velours rouge sont présentés des objets érotiques des XIXe et XXe siècles. Et pas n’importe lesquels : des objets à transformation, c’est-à-dire qui ne laissent apparaître l’image libertine qu’après l’ouverture d’un double fond, le mouvement d’un pommeau, le jeu d’un ressort. Des groupes de personnages en bronze, susceptibles de pivoter, des tabatières, des cannes surtout (dont l’une appartint à André Breton), des montres à gousset, des éventails et des cartes à observer en transparence montrent l’extrême inventivité des artisans (ou de leurs commanditaires) dans ce type de pièces. L’ensemble des 150 objets présentés appartient à un seul collectionneur. La façon dont l’auteur l’a rencontré à l’aéroport de Larnaca, puis sur un yacht en mer Méditerranée, tient plus du roman de Gérard de Villiers que de la préface de conservateur mais ne manque pas de piquant.

  • Eros secret, objets érotiques à transformation sous la direction de Véronique Willemin, éditions Humus, 2007, 208 p., 69 €, ISBN : 2-940127-37-9

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  • BRÈVES

    CHICAGO - Selon le blog Modern Art Notes du 12 décembre, la statue Faune de l'Art Institute, jusqu'à présent attribuée à Rodin, serait un faux.

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    LONDRES – Le gouvernement britannique vient d’annoncer qu’il accordait une contribution de 50 millions £ au projet d’extension de la Tate Modern, signé par les architectes Herzog et de Meuron, dont l’ouverture pourrait être programmée pour les Jeux olympiques de 2012.

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    MIAMI – Art Basel Miami Beach a reçu 43 000 visiteurs pour sa 6e édition, du 6 au 9 décembre.

    NEW YORK – Le record pour une statue de l’Antiquité en vente publique a été pulvérisé le 5 décembre chez Sotheby’s avec la Lionne de Guennol, un minuscule chef-d’œuvre de l’art élamite adjugé 57 millions $, soit le quadruple des estimations.

    VATICAN – L’historien d’art Antonio Paolucci, qui fut brièvement ministre de la Culture puis directeur des musées de Florence, vient d’être nommé directeur des musées du Vatican.

    VERSAILLES - Jean-Jacques Aillagon, le président de l'établissement public du parc et du château de Versailles, a annoncé une rétrospective des sculptures monumentales de Keff Koons en septembre 2008.

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    Cette semaine, ne manquez pas

    40e SALON DE LA MARINE – RÉTROSPECTIVE

    PARIS – A l’occasion de sa 40e édition, le Salon de la Marine, seule manifestation artistique officielle depuis que l’Etat ne soutient plus le Salon des beaux-arts, a choisi de se pencher sur sa riche histoire, commencée en 1905. Il présente une rétrospective des crus passés et accueille les Peintres de Marine belges.

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    ROBERT G. SCHMIDT – ŒUVRES RÉCENTES

    PARIS – Elève de l’académie Julian, ami de Messiaen, de Paulhan et de Gen Paul, Robert G. Schmidt est un coloriste qui aime croquer les villages de France, les petits ports, le Paris de Marcel Aymé ou les paysages lumineux où il fait bon vivre. La galerie Saint Roch lui consacre sa première rétrospective depuis 2001.

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